La date approche quant à la tenue à Singapour du procès sur la cargaison de bois de rose en provenance de Madagascar et saisie en 2013 à son passage dans cette Ville/Etat d’Asie du Sud-est. Objet d’une campagne de communication bien orchestrée qui, à travers des insinuations à peine voilées, le désigne comme étant l’un de ceux qui sont impliqués dans cette affaire, l’opérateur économique Maminiaina Ravatomanga a décidé de sortir de son silence par le biais d’une interview exclusive qu’il nous a accordée, hier. Aux questions sans complaisance qui lui ont été posées, l’homme d’affaires répond d’une manière directe et sans dérobade. Et ce, « pour que la vérité éclate », selon ses propres termes.
La Vérité (LV): Le procès des bois de rose saisis à Singapour est pour bientôt. Avez-vous été convoqué à cette audience? Si oui, à quel titre?
Maminiaina Ravatomanga (MR): Je tiens à rappeler que cette affaire des bois de rose de Singapour remonte à 2013. Depuis qu’elle a éclaté, à aucun moment, je n’ai fait l’objet d’une quelconque convocation s’y rapportant, à quelque titre que ce soit. Que ce soit d’ailleurs de la part des autorités malgaches que de celles de Singapour. C’est pour vous dire que, depuis le début jusqu’à aujourd’hui, je n’ai été impliqué ni de près ni de loin par les enquêteurs locaux ou étrangers dans cette affaire. Pour répondre à votre question, je n’ai pas été convoqué pour ce procès, comme je ne l’ai pas été lors du premier.
LV: Vous n’avez donc aucune appréhension, quant à ce que pourrait être l’issue du procès de Singapour, ne serait-ce que des révélations qui sont susceptibles d’en ressortir.
MR: Aucune. Bien au contraire, je dirai « Que la vérité éclate », afin de ne plus laisser la part belle aux rumeurs et aux accusations malveillantes. J’irai même plus loin en exhortant les responsables, qu’ils soient Malgaches ou Singapouriens, à aller jusqu’au bout de leur démarche. Car, ce que je ne comprends pas, c’est que, à un stade de l’enquête sur cette affaire, il y a déjà eu des noms qui ont été révélés. Pourquoi s’abstient-on de creuser cette piste pour se mettre à orienter les regards vers une personne qui, pourtant, n’y a pas été citée à aucun moment?
LV: Que répondrez-vous alors à ceux qui affirment que vous êtes impliqué dans cette affaire, voire au centre de celle-ci?
MR: Vous faites sans doute allusion aux insinuations à peine voilées parues dans certaines presses ces derniers temps. Si les informations dont il y est fait état étaient basées, ne serait-ce que sur le moindre commencement de preuve, croyez-vous que les autorités actuelles hésiteraient une seule seconde à m’appréhender et à convoquer une conférence de presse pour médiatiser mon interpellation? A un moment, le Gouvernement avait envoyé un ministre pour attester la légalité de l’exportation de la cargaison de bois de rose saisie à Singapour. En me désignant comme étant impliqué dans ce trafic, insinue-t-on donc que j’avais le pouvoir de dépêcher à l’extérieur un membre du Gouvernement de cette quatrième République pour défendre la cause de «ma» cargaison ?
LV: Mais à quoi serait donc due, d’après vous, l’apparition de telles allégations?
MR : Personne n’est dupe. Le fait que les accusations auxquelles dont vous faites état aient été véhiculées simultanément dans plusieurs organes de presse, démontre clairement qu’il s’agit d’une opération de communication. Ceux qui en sont les commanditaires veulent détourner des vrais coupables l’attention de la population, pour la diriger vers une personnalité dont ils veulent détruire l’image auprès de l’opinion publique. D’une pierre deux coups, en somme.
LV: A part cette affaire des bois de rose de Singapour, certains vous soupçonnent aussi d’être derrière les mouvements de protestation qui éclatent ici et là actuellement. Pour dire les choses telles qu’elles sont, on vous prête l’intention de déstabiliser et de renverser le pouvoir en place.
MR: Soyons sérieux. Si l’on en croit ceux qui véhiculent de telles accusations, je serais donc derrière les marchands de rue qui protestent contre la Cua, les chauffeurs de taxi-be qui manifestent contre la cellule d’intervention routière, les habitants d’Ambatobe qui s’insurgent contre la vente de leur terrain de sport, des délogés de la route d’Ivato qui s’opposent à la destruction de leurs maisons, ou encore les habitants d’Isotry qui réclament l’arrêt des délestages… et j’en passe. Je suis un opérateur économique à la tête de nombreuses sociétés dont la gestion accapare toutes mes journées. Je n’ai pas le temps et je ne vais pas perdre mon temps à de telles manigances. Tous ces mécontents ont des raisons de protester. Ils n’ont pas besoin d’être orchestrés pour agir.
LV: Mais encore une fois, quelle serait l’origine de telles rumeurs?
MR : A qui profite le crime, dit-on. Il faut chercher qui, pour se disculper de son propre échec, cherche un bouc émissaire pour lui attribuer la responsabilité de sa déconfiture pour, soi-disant, lui avoir mis les bâtons dans les roues. Or, il se trouve que toutes les agitations qu’on observe actuellement font suite aux maladresses du pouvoir en place lui-même.
LV: Parlez-nous de l’interdiction de sortie du territoire (IST) dont vous avez fait l’objet. Quel est son motif et est-ce qu’elle est toujours maintenue?
MR : Cette IST date de l’année dernière, je tiens à le rappeler. Quelque temps seulement après son émission, cette mesure a été annulée par le Parquet général, justement parce qu’elle n’a aucune base légale. Mais en plus, par la suite, la même mesure a été aussi annulée par le Conseil d’Etat, toujours pour la même raison. Seulement, cette série de décisions prises au niveau de la Justice semble n’avoir aucun effet sur l’Exécutif. A ce jour, en effet, le ministère de l’Intérieur ne s’y est pas plié et n’a pas officialisé la levée de l’IIS. Pour résumer la réponse à votre question, L’IST n’a aucun motif, elle a été annulée pour cette raison par la Justice, mais elle est toujours maintenue. Actuellement, des démarches auprès d’instances internationales sont en cours face à cette situation de non-droit.
LV: Dernière question. Pourquoi avoir gardé le silence jusqu’ici et avoir choisi de rompre votre mutisme maintenant?
MR: Face à la désinformation à laquelle on assiste ces derniers temps, continuer à se taire serait coupable. Etant au centre de cette campagne de dénigrement, je me dois d’éclairer l’opinion publique sur certaines réalités que certains veulent déformer afin de se protéger de leurs propres agissements. Le procès de Singapour sera pour le public une occasion de juger par lui-même qui sème le mensonge dans cette affaire, comme dans d’autres.
Recueillis par Hery Mampionona
27 avril 2016
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