Une émeute a eu lieu derrière le bâtiment de l’Hôtel de Ville, le 9 novembre 2016, en début de soirée. Selon des témoins dans la foule, l’incident a eu lieu parce qu’un agent de la Police Municipale avait eu le malheur de brutaliser une femme enceinte. Conduite ensuite dans l’enceinte du bâtiment officiel la victime fait l’objet d’une manifestation de sympathie de la part d’un parent de la victime et des autres marchands rendus furieux par les actes arbitraires subis au quotidien. La Mairesse surprise par cet attroupement imprévu n’a pu quitter les lieux qu’après l’arrivée des forces de l’ordre venu pour disperser une foule en colère. L’effervescence a failli mal tourné. Comble de malheur, cette bavure accomplie par un agent de la Police Municipale tombe mal, car elle se passe juste à un moment où le ministre de la Sécurité Publique se trouve indisposé, malade de nouveau, pour la énième fois, hospitalisé à Befelatanà na. Un tel état de santé serait-il compatible avec les dispositions qu’exigent la tenue et le bon déroulement du Sommet de la Francophonie ? Le Chef du gouvernement ne doit pas faire passer le favoritisme et l’amitié particulière sentimentale avant les intérêts supérieurs de la Nation et de la Sécurité avec un S majuscule à cause d’une forte présence de hautes personnalités étrangères.
Des militaires débarquent à l'hôtel de ville, côté lycée J.J. Rabearivelo
Les problèmes d’occupation spatiale ne datent pas d’hier. Il faut voir l’origine de cette mésentente permanente qui a toujours opposé les responsables communaux avec les marchands forains et les vendeurs informels. Jadis, bien achalandés côté esplanade en face des pavillons, les marchands ont connu l’âge d’or des jours de marché toute la semaine et celui hebdomadaire qui depuis la nuit des temps avait été à l’origine de l’appellation marché du Zoma. Les contraintes urbaines étant ce qu’elles sont sous la pression de la modernisation et de l’évolution du pouvoir d’achat des habitants devenus propriétaires de véhicules, beaucoup de mesures furent prises pour libérer le centre-ville afin de transformer l’esplanade en un grand parking à ciel ouvert. Malheureusement, pour les décideurs, les cas de la transhumance des petits vendeurs de marchandises divers n’ont jamais été abordés sérieusement. Par ailleurs, au fils des ans, l’invasion des colporteurs devenus par la suite des vendeurs de produits d’habillement, de pacotilles et autres petits produits fournis par les surplus des zones franches et les exportations clandestines couvertes par des attachés commerciaux de certains ambassades. Année après année, des bataillons de détaillants envahissent les trottoirs au point de gêner pratiquement les circulations des piétons obligés d’emprunter les bords des rues au risque de provoquer des accidents avec les véhicules qui passent. L’arrivée des grossistes chinois de Behoririka n’ont fait que rendre de plus en plus complexe les relations des commerçants qui, virés des usines pour cause de compression de personnel n’ont trouvé rien de mieux que de se recycler dans la distribution des produits made in china et de tous le Sud-Est asiatique. Tel est donc ce nœud gordien qu’aucun responsable de la Commune Urbaine d’Antananarivo n’a jamais pu trancher avec efficacité.
Il se trouve toutefois qu’actuellement avec la présence du couple Marc-Lalao à la tête de l’administration urbaine, la gestion des emplacements réservés à ces multitudes de personnes qui consacrent leur existence aux commerces les plus divers, est devenu pratiquement une bombe à retardement qui peut exploser d’un moment à l’autre pour plusieurs raisons. D’abord, l’amateurisme, l’ignorance et la tendance à des actes extra-légaux quant aux attitudes à adopter envers les marchands ne font qu’aggraver une situation déjà irritante pour les concernés. Puis il y a aussi cette absence de volonté politique des services de la municipalité à prendre le taureau par les cornes. Qu’est-ce qui empêche les autorités municipales de convaincre leurs interlocuteurs par des dialogues pour amener ces derniers à s’installer dans des endroits qui, (précisons bien) puissent convenir et favoriser leurs activités ? Au lieu de cela, on assiste à des solutions qui n’obéissent à aucune logique commerciale et qu’on impose avec beaucoup de maladresse. Le fin fond de l’histoire vient du fait que ni la mentalité de Marc Ravalomanana qui s’impose dans les prises des décisions, ni les pratiques légales et administratives ne favorisent guère le bon fonctionnement d’une municipalité et d’un conseil municipal bafoué à longueur d’année par une dictature qui ne dit pas son nom. Il va de soi qu’au niveau des exécutants tout va de travers. Sinon comment expliquer ces ramassages abusifs des marchandises des vendeurs à la sauvette ? Au fait, quels sorts réserve-t-on à ces biens des personnes que des voyous au service de la municipalité arrachent à leurs propriétaires ?
La municipalité a fait fermer le portail mais les militaires attendent
En vertu de quels textes législatifs ces brutes portant des badges peuvent-ils agir ainsi et parfois extorquer des sommes d’argent à des citoyens qui ne demandent qu’à devenir des contribuables réguliers si les responsables savent s’y prendre ? Par-dessus le marché, les agents de la Police Municipale couvrent de tels méfaits avec la bénédiction de tous les chefs hiérarchiques. Et ce n’est pas la première fois que ces policiers en bleu et béret jaune se livrent à des extrémités envers le public, et les chauffeurs des bus…Marc Ravalomanana, le conseiller spécial de Mme Lala laisse faire…Serait-ce dans l’espoir de provoquer la colère des secteurs concernés afin d’arriver à faire éclater dans la capitale une insurrection susceptible de contraindre suffisamment le régime actuel à quitter le pouvoir ?…Quoi qu’il en soit, le président Hery Rajaonarimampianina a intérêt à se méfier de cet ambitieux looser qui n’attend que l’occasion favorable pour assouvir sa soif de pouvoir et retrouver les honneurs et les prérogatives perdus. Pour lui, tous les moyens sont bons pour devenir de nouveau le maître de tout un pays sans passer par les urnes. L’Amiral Didier Ratsiraka en a fait la triste expérience en 2001, lorsque le maire d’antan avait ouvert la Place du 13 Mai à une Cellule de crise qui s’est terminé par l’auto proclamation du «1er tour de vita». «La méfiance est l'œil droit de la prudence », disait William de Britaine. A l’heure actuelle, il ne se passe pas une semaine dans la capitale, sans que des incidents violents ne provoquent la colère des foules.
N. RAZAFILAHY - La Gazette de la Grande île