«De précieux collaborateurs», a dit en un mot, Jean Louis Andriamifidy, le DG du Bureau Anti-corruption. Ce sont 22 journalistes professionnels de 25 à 75 ans (le plus vieux étant membre actif du Club des Journalistes Doyens et encore en activité dans la Région Sud-Ouest). Ils viennent d’obtenir leurs «cartons» en tant que journalistes d’investigations, au cours d’une sympathique cérémonie au Restaurant R.P à Talatamaty le 15 décembre dernier. «Toutefois », met en garde, Gérard Rakotonirina, président de l’Ordre des Journalistes, « Le journaliste investigateur doit être plus professionnel, respecter encore plus la déontologie et non dénoncer à tort et à travers une personne, sans preuves deux fois indéniables ». Ces journalistes formés en investigation ont été appuyés et financés par l’UNESCO.
Traquer la corruption. Les sujets d’investigation que les 22 récipiendaires ont choisis, pour illustrer et compléter leurs cours, soulèvent et tournent autour de la corruption, ce fléau qui truffe les vols de zébus avec blanchiment d’argent (classé parmi la meilleure investigation réalisée par l’équipe n° 7 dans Trandraka n° 2). Celle de la Région Sud-Ouest a traité, de fond en comble, tout ce qui concerne le trafic des tortues depuis leur origine du côté de l’Androy jusqu’à l’aéroport d’Ivato.
Un dénominateur commun, toutes les investigations dénoncent, chaque fois, un haut fonctionnaire de l’Etat se trouvant au cœur de l’imbroglio, impliquant en même temps, des membres de force de l’ordre. Un véritable réseau inextricable. Dès lors, si un enquêteur met son nez dans l’affaire, il faut toujours s’attendre à une «intervention», ce qui complique l’investigation et celle-ci se termine souvent en queue de poisson. Trafic? Il n’y a aucun doute. Mais personne ne veut dénoncer, de peur de tuer la poule aux œufs d’or. Quand le grossiste en tortues (Toliara) vous assure qu’il est en train de pourvoir une commande de 3.000 unités, il y a lieu de le croire. Et non croire tous les responsables de l’Etat qui empêchent «la marchandise» de sortir de nos frontières, qui font des pieds et des mains à vide, pour montrer qu’ils font leur travail comme il faut. Alors qu’il n’y a pas suffisamment de contrôle.
Que faire des gens du palais? Il n’y a rien à faire avec tous ces «conseillers spéciaux». A peine arrêtés qu’ils sortent déjà , comme si de rien n’était. «Voilà le mal dans votre pays», a constaté un étranger: «l’impunité». Les gens se rendent comptent qu’on a cessé d’appliquer les lois en vigueur, ce qui explique que les arrestations sont bien inférieures aux prévenus avec quelques mandats de dépôt insignifiants. A la longue, les gens ne font plus confiance à la justice et préfèrent «la vindicte populaire». A la place du tribunal, le «Dina Be» prend de l’importance, avec validation légale du tribunal. Que reste-t-il à faire ? Il manque tout juste «une volonté politique, un signal fort de la part des décideurs politiques, de combattre enfin la corruption, par tous les moyens, sans les discours vides de contenus, tout en appliquant la loi», selon le DG de Bianco dans son discours du 9 Décembre, marquant la Journée internationale dédiée à la lutte contre la corruption.
Charles RAZA, correspondant