Il faut, avant d’aborder le fond de cet article, rappeler une bonne fois pour toute que l’insécurité alimentaire, à Madagascar, ne date pas de l’actuelle crise politique, mais est devenue endémique. Particulièrement au sein des populations du Sud de la Grande île. La situation du moment ne fait qu’accentuer un fait qui est devenu presque banal, si l’on se réfère à l’insouciance (et le mot est faible) des dirigeants passés.
Cela dit, un point de presse a eu lieu, ce mercredi 24 février 2010, au siège du PAM (Programme alimentaire mondial) à Ambatoroka Antananarivo. De quoi s’agissait-il ? De la préoccupation du gouvernement français vis-à -vis des conséquences, pour Madagascar, de la crise économique et financière mondiale, ainsi que celles liées à la crise politique. La dégradation de la situation économique et sociale à Madagascar peut conduire à une aggravation de la situation sanitaire globale de la population et l’amplification d’une crise alimentaire chronique. En milieu urbain, en particulier, où plus de la moitié de la population vit depuis de nombreuses années en dessous du seuil de pauvreté, l’insécurité alimentaire touche l’ensemble des quartiers pauvres, et le taux de malnutrition chronique y est plus élevé que la moyenne nationale.
Afin de répondre à cette situation, l’aide alimentaire programmée depuis 2004 par la France en faveur de Madagascar a mobilisé plus de 6 millions d’euros, soit en moyenne 1 million d’euros par an au cours des 6 dernières années.
L’importante aide alimentaire française est complémentaire d’actions structurelles mises en œuvre par la coopération française afin d’assurer le développement durable de l’agriculture malgache et donc la sécurité alimentaire du pays. L’Agence Française de Développement (Afd) développe les programmes « bassins versants et périmètres irrigués » (32,5 millions euros), et « promotion de l’agro-écologie » (5,9 millions d’euros). Des actions sont aussi conduites au bénéfice de la société civile et des organisations non gouvernementales par l’octroi de subventions du Fonds Social de Développement (1,1 millions d’euros pour le FSD VI et 1,2 millions d’euros pour le FSD VII). La gestion du FSD est assurée par le Service de Coopération et d’Action Culturelle (SCAC) de l’Ambassade de France.
La France a fait le choix de maintenir son aide publique au développement à Madagascar au bénéfice premier de la population malgache, en orientant prioritairement l’aide en faveur des secteurs sociaux pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement (santé, éducation, assainissement…) et des acteurs non étatiques (ONG, secteur privé…).
Concernant l’aide alimentaire en 2010, la France met en place une première tranche d’un montant de 1 million d’euros, soit 2 milliards 950 millions d’ariary. Comme en 2009, une seconde tranche -dont le montant n’est pas encore fixé- devrait être octroyée en juin 2010. La première tranche sera mise en œuvre par les opérateurs suivants :
- La Croix Rouge Malgache : 100.000 euros (environ 295 millions d’ariary) afin d’approvisionner les actions de nutrition menées dans les quartiers défavorisés d’Antananarivo dans le cadre de l’opération « restaus du cœur » ;
- La SAF-FJKM : 70.000 euros (environ 206 millions d’ariary), afin de permettre la distribution de nourriture dans le cadre de programmes « vivres contre travail », essentiellement en région Analamanga (Tananarive et périphérie) ;
- Le GRET : 280.000 euros (environ 826 millions d’ariary), pour des actions de lutte contre la malnutrition via le réseau Nutrimad dans 5 régions sensibles, soit 41 communes rurales et 4 centres urbains. Cette opération aura pour objectifs, outre la distribution de nourriture proprement dite, de sensibiliser les populations en matière de choix de nutrition, d’hygiène et de santé, de promouvoir des solutions alimentaires visant à la prévention de la malnutrition, de populariser chez les acteurs (ONG, œuvres caritatives et institutions sociales) des solutions alimentaires fortifiées élaborées par Nutrimad et d’assurer un suivi-évaluation des enfants malnutris au sein des centres de santé.
- Le PAM : 300.000 euros (environ 885 millions d’ariary), pour le renforcement du soutien alimentaire dans les zones urbaines, notamment par l’augmentation du nombre de cantines scolaires de centres sociaux des 4 villes les plus vulnérables sur le plan de la sécurité alimentaire : Antananarivo, Tuléar, Tamatave et Fianarantsoa. Ce soutien s’avère crucial pour prévenir l’abandon définitif et renforcer la protection de l’enfance dans un milieu urbain caractérisé par un contexte d’abandon scolaire et de vulnérabilité accrue des ménages.
- L’UNICEF : 250.000 euros (environ 737 millions d’ariary), pour la poursuite d’opérations organisées dans les centres de nutrition de 5 secteurs urbains et 5 secteurs ruraux particulièrement touchés par l’insécurité alimentaire.
Jeannot RAMAMBAZAFY
Photos : Andry RAKOTONIRAINY