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Home Editorial Madagate Affiche Madagascar SeFaFi: 2011, du gâchis. Un an d’archives de l’Histoire politique malgache

Madagascar SeFaFi: 2011, du gâchis. Un an d’archives de l’Histoire politique malgache

Mardi 8 mai 2012 : « En général, il n’y a pas de réelle volonté de sortir de cette crise, au-delà des effets d’annonce et des intentions de quelques minorités », dixit Ralison Andriamandranto (au centre sur la photo ci-dessus), coordonateur du SeFaFi ( « Sehatra Fanaraha-maso ny Fiainam-pirenena », association régie une ordonnance du 3 octobre 1960, qui a pour vocation d’identifier et d’approfondir les problèmes de société, de diffuser les résultats de ses travaux en vue d’une meilleure pratique de la démocratie et de l’Etat de droit…)

« Il est inconcevable et inadmissible que l’ordre des élections ne soit pas encore défini, cela principalement à cause de calculs politiques (...) voilà pourquoi le SEFAFI insiste pour que l’on tienne les élections législatives avant les présidentielles. Les politiciens ont beaucoup à perdre, mais la démocratie a tout à y gagner », (cf. Communiqué du 22 février 2011)

Les communiqués qui suivent constituent le contenu du 10ème recueil publiés tout au long de l’année 2011. Ce recueil est tout simplement intitulé : « 2011, l’année de la honte ». www.madagate.com les publie pour les archives de l’Histoire politique de Madagascar de cette première décennie du Troisième Millénaire. Mais en commençant par le communiqué en date du 3 février 2012.

Jeannot Ramambazafy

QUELLE AMNISTIE, ET POUR QUOI FAIRE ?

La question controversée de l’amnistie se trouve au cœur du conflit politique depuis des mois. Le sujet divise l’opinion, et le SeFaFi lui-même peine à élaborer une ligne de pensée qui concilie les points de vue légitimes des uns et des autres. Sur cette question, bute aujourd’hui le schéma d’une sortie de crise sereine et durable. Anticipant sur cette sérénité et son caractère durable, l’article 16 de la Feuille de route du 18 septembre 2011 précise qu’aucune élection ne peut avoir lieu sans l’adoption d’une loi d’amnistie.

Derrière le mot « amnistie » toutefois, dont le sens exact échappe à beaucoup, se joue le sort de la transition et, pour une part, l’avenir du pays pour les années à venir. Le SeFaFi engage donc ici une réflexion destinée à éclairer le débat, afin que chacun puisse prendre position en connaissance de cause et que les politiciens agissent en fonction des enjeux nationaux et non pour satisfaire leurs prétentions égotistes, leurs ambitions politiques et leurs intérêts personnels.

Qu’est-ce qu’une amnistie ?

Dans sa définition la plus simple, l’amnistie est un acte législatif qui fait disparaître le caractère délictueux d’une action. Elle aboutit à l’effacement pur et simple d’actes qui ont violé la loi. Sans nier les faits, elle efface leurs conséquences juridiques. Si les faits incriminés ont déjà été jugés, on parlera d’une amnistie des peines qui supprime les condamnations prononcées sans pour autant effacer les faits; si les faits n’ont pas encore été jugés, on parlera d’une amnistie des faits qui arrête toute poursuite pénale contre une infraction.

Ainsi donc, ne peuvent être amnistiés que des faits précis. Il ne peut exister d’amnistie générale couvrant une époque définie sans que soit fournie la liste des délits concernés et de leurs auteurs présumés, pas plus qu’il ne peut y avoir d’amnistie pour une catégorie d’infractions sans que soit précisées les circonstances dans lesquelles chacune a été commise et l’identité de leur auteur. Enfin, les amnisties sont souvent soumises à des restrictions : il est des délits qui ne peuvent être amnistiés. La feuille de route en énumère quelques-uns.

L’amnistie selon la Feuille de route

Le cadre juridique en est clairement posé par la Feuille de route : « la loi d’amnistie sera ratifiée par le Parlement de Transition » (art. 18). Rappelons toutefois que les membres de ce Parlement (Conseil Supérieur de la Transition et Congrès de la Transition) n’ont pas été élus par le peuple ; ils ont été nommés au terme d’un processus entièrement contrôlé par des politiciens auto-désignés. Ils auront donc à pallier ce défaut de légitimité populaire en votant une loi d’amnistie qui soit clairement au-dessus de tout soupçon partisan. Sur quoi devra alors porter cette amnistie? Dans le même article 18, la Feuille de route donne deux précisions essentielles, en mentionnant l’« octroi d’une amnistie large pour tous les évènements politiques intervenus entre 2002 et 2009 ». Les limites dans lesquelles une amnistie peut être octroyée sont ainsi balisées : elles obligent le législateur à se limiter aux seuls actes politiques répertoriés entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2009. La question rebondit aussitôt : qu’est-ce qu’un « événement politique » ? Il n’est pas inutile de rappeler ici que le politique consiste à gérer une collectivité, à savoir l’Etat et ses démembrements, en vue du bien commun de la nation et en vertu des pouvoirs obtenus par délégation populaire. Ainsi, seuls les délits en rapport avec l’exercice du pouvoir sont donc concernés par l’amnistie. Et cela vaut évidemment pour tous ceux qui ont exercé des responsabilités politiques avec Marc Ravalomanana de 2002 à 2009, ainsi que pour tous ceux qui ont participé à la Transition en 2009.

A l’inverse, les délits de droit commun, même liés à l’exercice du pouvoir, n’entrent pas dans le champ de l’amnistie. Ainsi, un détournement de fonds publics n’est pas un événement politique. La fraude fiscale, l’accaparement illicite de terrains publics ou privés, toute forme de corruption active ou passive, le viol ou la signature d’un chèque sans provision ne sont pas des événements politiques. Même si (et surtout si) ces faits répréhensibles sont commis par des hommes politiques, ils ne relèvent pas de l’amnistie. Le SeFaFi n’a cessé de dénoncer ces malversations et l’impunité qui leur est liée (1). Fidèle à sa ligne de conduite suivie depuis dix ans, il ne peut aujourd’hui se déjuger en ce domaine. Les restrictions à l’amnistie La Feuille de route introduit, dans son article 18, l’exigence pour la Transition d’octroyer une « amnistie large ». Ce qui signifie, avant toute autre considération, que l’amnistie envisagée ne sera ni systématique ni inconditionnelle. Une amnistie ne pourra donc être que sélective, si l’on considère la palette des délits que les politiciens sont susceptibles d’avoir commis. Mais la Feuille de route introduit d’autres restrictions. A deux reprises, et cette répétition est significative, elle exclut formellement de l’amnistie et de toute mesure d’apaisement, « les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les crimes de génocide et les autres violations graves des droits de l’homme et des libertés fondamentales » (articles 16 et 18). Madagascar n’a sans doute jamais connu de génocide, mais d’autres crimes et violations graves des droits de l’homme et des libertés fondamentales y ont été commis, y compris pendant les années 2002 à 2009. Une conscience citoyenne ne peut ignorer ces réalités, ne fût-ce que pour garder mémoire de ceux et celles qui en ont été les victimes innocentes. Ce qui suscite une nouvelle difficulté : qui va établir la liste des délits ainsi qualifiés pour être amnistiés ?

(1) « Les entorses aux pratiques budgétaires », 14 mai 2004, dans Une démocratie bien gérée, décentralisée et laïque, à quelles conditions ?, SeFaFi, 2005, p. 10-17. « Souveraineté nationale et droits de l’homme », 22 mai 2007, dans Elections et droits de l’homme : la démocratie au défi, SeFaFi, 2008, p. 28-35. « La force ne résout pas les problèmes », 19 avril 2009, dans Tourmente populaire et confusion politique, SeFaFi, 2010, p. 20-25. « Halte à l’impunité », 19 février 2010, dans Quand les politiciens prennent les citoyens en otage, SeFaFi, 2011, p. 16-23…

 

L’établissement de la liste Le prix à payer pour se faire amnistier sera de figurer sur une liste pu-blique, communiquée aux médias, et qui porte mention des crimes amnistiés. L’accord sur l’amnistie que nos politiciens, non élus et donc non-redevables aux citoyens, auront mis au point devra être soumis au droit de regard du peuple. Contrairement à ce qui a été fait dans le passé, la loi d’amnistie devra présenter la liste des personnes concernées, ainsi que des faits et des peines amnistiés. Chez les politiques, l’intérêt de la population ne vient pas en priorité. Dans le contexte juridico-politique actuel, qui a perdu toute crédibilité, le meilleur espoir d’arriver à l’apaisement consiste à reconnaître ce qui a été fait, avec rigueur et honnêteté. Il reviendra alors au décideur ultime, le peuple, de trancher par un vote émis en toute connaissance de cause, comme le veut la démocratie. Il ne peut donc pas y avoir d’amnistie sans qu’ait été établie au préalable la liste des délits à amnistier, conformément à l’esprit de la feuille de route. Mais à qui reviendra-t-il de dresser cette liste, en qualifiant les faits incriminés et les peines prononcées qui feront l’objet d’une amnistie ? A cette question cruciale, une première réponse de bon sens s’impose : il serait inconcevable, socialement injuste et moralement inadmissible, que cette liste soit établie par les seuls politiciens. Nul ne saurait être juge et partie, en une matière aussi délicate. Pareille démarche reviendrait à entériner une autoamnistie synonyme d’impunité : venant de la part d’une classe politique qui ne cesse de s’illustrer par son incompétence, sa vénalité et sa suffisance, elle provoquerait le rejet, voire même la révolte, de la part de citoyens parfois condamnés alors qu’ils sont innocents, et toujours sans recours devant l’arbitraire d’une justice corrompue. L’impunité des soi-disant responsables n’est plus tolérable. D’où la suggestion que le SeFaFi propose à l’attention de tous : la création d’un comité ad hoc chargé d’établir la liste des personnes et des faits ou des peines à amnistier. Ce comité sera composé d’un nombre retreint (une vingtaine au plus) de personnalités notoirement courageuses et intègres, aux convictions affirmées mais respectueuses des autres. Il comptera un nombre égal de représentants de la classe politique et de représentants d’entités non politiques, les premiers étant désignés par le Parlement, les seconds par leurs corps respectifs d’appartenance : FFKM (Conseil des Églises chrétiennes à Madagascar), CSM (Conseil Supérieur de la Magistrature), Grands corps de l’État, Forces armées, Journalistes, etc. L’amnistie de la Feuille de route, préalable aux élections.

« La loi d’amnistie sera ratifiée par le Parlement de Transition et aucune élection ne devra avoir lieu avant cette ratification » (art.18). L’injonction est sans ambigüité, mais ses conséquences n’ont sans doute pas été mesurées à leur véritable ampleur par les rédacteurs de la Feuille de route. Car l’amnistie est un outil juridique et politique d’apaisement, qui normalement suit un conflit et permet aux personnes qui se sont affrontées de reprendre la vie ensemble, dans un esprit de réconciliation. Depuis l’Antiquité, des clauses d’amnistie figurent dans les traités de paix qui concluent une guerre ou dans les édits de pacification qui mettent un terme à un conflit interne. L’amnistie a donc pour objet « une fois le règlement du conflit terminé, d’empêcher que la recherche de nouveaux griefs ne rallument les hostilités entre les belligérants. C’est une mesure d’apaisement à la fin d’un conflit» (Wikipedia).

Mais aujourd’hui, l’amnistie envisagée doit intervenir avant même que le conflit ne soit terminé, puisqu’elle doit ouvrir la voie aux élections qui, elles, constitueront l’ultime étape de la sortie de crise. C’est une première car, dans notre Grande Île, les lois d’amnistie ont toujours été promulguées a posteriori, une fois l’ordre rétabli par la répression et le pouvoir consolidé et hors de danger. Or l’enjeu de l’amnistie dont il est question ici consiste moins à faire la paix qu’à préparer la confrontation électorale. Certains politiciens en ont besoin pour se refaire une « virginité politique » : l’amnistie leur rendra un casier judiciaire « blanc », nettoyé de toute condamnation passée, leur permettant à nouveau de poser leur candidature à un poste électif. D’autres, par contre, refusent l’amnistie afin d’éliminer des adversaires électoraux potentiels dont le casier judiciaire ne leur permet pas de se présenter aux élections. Dans les deux cas, il faut le reconnaître, on assiste à une instrumentalisation de l’amnistie. Quelle est alors l’approche la plus apte à ramener la paix dans le long terme ?

L’exigence incontournable de la Feuille de route peut être satisfaite de deux manières différentes :

- La première consiste à accorder une amnistie générale et inconditionnelle à tous, en partant du principe qu’il faut rendre à chacun la possibilité de se présenter aux élections et que les citoyens feront ensuite preuve de maturité suffisante pour choisir entre le bon grain et l’ivraie. C’est là, il faut le reconnaitre, une solution risquée dans la mesure où l’expérience nous montre que l’électorat est souvent mal informé et qu’il ne vote pas forcément selon sa conscience. La conséquence en est prévisible : on prend les mêmes et on recommence ! Cette solution, conforme à l’esprit de la realpolitik, ne s’embarrasse ni de justice ni d’éthique, et se limite à gérer le court terme. Le SeFaFi est conscient qu’elle a pourtant les plus grandes chances d’être retenue, compte tenu de l’opportunisme, du cynisme et de l’absence de sens moral de notre classe politique. Il se doit de mettre en garde contre les effets nocifs à long terme de cette formule, qui consacrera la culture de l’impunité au profit des politiciens et développera frustration et mécontentement chez les citoyens.

- La deuxième option sera plus délicate à mettre en œuvre. Elle présuppose qu’une réconciliation nationale repose sur l’application de principes éthiques et des valeurs partagées de la culture nationale. Dans ce cadre, il est des délits qui ne relèvent pas de l’amnistie mais de la justice, tous les citoyens étant égaux devant la loi. D’où la nécessité d’une amnistie certes large, mais octroyée au cas par cas, et donc justifiée. Une consultation électorale ne saurait laver ce qu’une amnistie ne peut effacer, elle ne peut se substituer au tribunal pour des délits graves commis hors de la sphère politique. Cette amnistie justifiée devrait alors clairement répondre à la question : pourquoi un candidat au passé entaché de graves manquements à la loi commune pourrait-il encore prétendre à réaliser l’intérêt général de la nation ? L’histoire de Madagascar depuis 1960 est encombrée d’hommes qui, après avoir failli, ne songent qu’à revenir au pouvoir sans jamais remettre en question leurs actes et sans admettre leurs échecs. Cette irresponsabilité, doublée d’une pratique de l’impunité tenue pour normale, constitue l’obstacle majeur à une sortie durable de la crise.

L’amnistie de la Feuille de route est subordonnée à la tenue des élections. Elle va créer une situation ambigüe, aux cartes biaisées : soit une élimination a priori de candidats potentiels par loi d’amnistie sèmera les discordes de demain, soit une amnistie inconditionnelle et générale consacrera l’impunité des politiques sans résoudre les vrais problèmes. L’idéal serait alors que tous les politiciens qui ont des démêlés avec la justice aient la sagesse et le courage politique de se retirer de la vie publique, et que le président Rajoelina honore sa promesse de ne pas être candidat à l’issue de la Transition.

En toute hypothèse, la loi d’amnistie devra être large, transparente et publique. La majorité des Malgaches, y compris le SeFaFi, ne se font guère d’illusion, ils savent que toutes les parties prenantes ont un intérêt particulier à ce que l’amnistie soit prononcée ou ne le soit pas, à ce qu’elle soit générale ou sélective. A travers les régimes successifs, eux-mêmes minés par des crises incessantes, l’amnistie a servi de pansement temporaire et superficiel pour clore un épisode douloureux ou embarrassant. Nous courons actuellement le risque de répéter le même scénario, avec un risque additionnel d’envenimer la future période électorale. Mais qui est encore capable de regarder au-delà des visées électorales personnelles, de considérer le véritable intérêt général, et de choisir entre les compromissions de la realpolitik et les exigences de l’éthique citoyenne ?

Antananarivo, 3 février 2012

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POUR LE RETOUR A L’ORDRE CONSTITUTIONNEL, GERER LES AFFAIRES COURANTES ET PREPARER LES ELECTIONS

Après la mise en place d’un Gouvernement et d’un Parlement de transition, l’organisation d’élections reconnues par tous sera la dernière étape du retour à un ordre constitutionnel attendu depuis trois ans. Nous ne reviendrons pas sur la manière dont le gouvernement a été mis en place, et sur les modalités de la formation du parlement de la transition ; elles ont démontré une fois de plus que notre classe politique ne s’intéressait qu’aux honneurs, à l’argent et au pouvoir pour le pouvoir. Le risque de blocage actuel provient de là. Mais à présent, pour cesser de tenir le peuple en otage, l’essentiel est d’avancer. Tout doit désormais être soumis à la mise en œuvre de la Feuille de route, qui mènera à une situation constitutionnelle acceptable par les citoyens et par la communauté internationale.

Préparer les élections

La première urgence est donc la préparation des élections. Aussi le Gouvernement d’union nationale et les Assemblées désignées devront-ils faire en sorte que, conformément à l’article 10-g de la Feuille de route, la CENI et les représentants qualifiés des Nations Unies puissent rendre public au plus vite le calendrier des élections à venir. La même Feuille de route précise dans son article 29 que la Transition s’achève le jour de l’investiture du nouveau Président de la République. Il en découle impérativement que les consultations populaires devront commencer par les élections législatives et s’achever par l’élection présidentielle. Le SeFaFi a déjà demandé que les premières soient tenues avant le mois de juillet 2012, et la seconde en octobre suivant. Par les législatives, les électeurs choisiront d’abord en toute liberté les candidats ou candidates et les partis politiques auxquels ils font confiance. Puis, en fonction du nouveau panorama politique qui aura émergé des urnes, les innombrables candidats à la fonction présidentielle verront si leurs ambitions correspondent ou non aux préférences démocratiques des citoyens. Ainsi sera mis un terme, il faut du moins l’espérer, aux prétentions d’individus et de groupuscules sans représentativité qui encombrent la scène politique depuis des années...

Que le parlement travaille…

Pour l’heure, il faut veiller à ce que le Parlement de transition, où les risques de pagaille sont importants, travaille effectivement sur les textes indispensables à la sortie de crise dont la liste est donnée par la Feuille de route. Certains ont déjà été élaborés, d’autres votés. Plutôt que de perdre un temps précieux à tout vouloir refaire, il sera plus efficace de les reprendre en les améliorant s’il en est besoin. Parmi les mesures de confiance et les efforts de réconciliation nationale, le Code d’éthique et de bonne conduite, destiné à régir les activités politiques à Madagascar durant cette période de transition aurait déjà dû être adopté et largement diffusé (Article 21 de la Feuille de route). C’est un premier pas indispensable et prioritaire vers l’adoption des autres mesures d’apaisement requises, dont l’adoption de la loi d’amnistie. Et cela donnerait un point de crédibilité à ce parlement désigné. Surtout si les revendications “salariales” des “parlementaires” apparues lors de l’examen de la loi de finances 2012, cessent pour de bon pour faire place à un programme de travail sérieux. Le parlement devra recommencer à siéger dès le début de l’année 2012.

De la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) et de la Cour Électorale Spéciale (CES)

Ensuite, la refonte de la CENI constitue une des étapes les plus délicates du processus. Le SeFaFi a déjà fait savoir qu’il est important d’en étoffer le staff technique. Par contre, y introduire les politiciens comme membres avec voix délibératifs serait une erreur majeure qui irait à l’encontre de l’esprit et de l’efficacité de l’institution ; conformément aux statuts actuels de la CENI, il est essentiel de limiter leur rôle à celui de simples observateurs. N’oublions pas que ce sont les politiciens successifs qui ont fait truquer toutes les élections à ce jour, et que le statut de la CENI implique son indépendance dans l’organisation des élections, loin de toute emprise des partis, qu’ils soient au pouvoir ou non. Par contre, leur statut d’observateurs aidera à garantir la crédibilité des scrutins, et réduira le risque de paralyser le processus électoral.

Quand à la CES, sa mise en place devra être effective et sa compétence, sa composition ainsi que ses règles de fonctionnement précisées sans contestation possible, avant la convocation des électeurs.

Quelle constitution ?

Reste la question de la constitution qui devra régir l’ordre constitutionnel retrouvé. Il n’est plus envisageable de revenir à la constitution modifiée en 2007 dans les conditions que nous savons tous. Sommes-nous alors dans une transition vers une IVème République dont la constitution reste à élaborer ou dans les dispositions transitoires de la constitution votée le 11 décembre 2010 ? Le SeFaFi avait noté en son temps que cette dernière est le texte qui a le plus de légitimité et de légalité, malgré ses imperfections et les circonstances partiellement contestables de son adoption. Les membres désignés du Parlement auront à reconnaitre que ce texte a été voté par le peuple, dans des conditions qui ne sont pas finalement pires que celles qui ont présidé aux référendums constitutionnels des républiques précédentes. Et il reviendra ultérieurement aux assemblées élues de corriger les insuffisances, les lacunes et les incohérences de la présente constitution de la IVème République. Cela peut a priori sembler difficile, mais c’est tout à fait faisable avec de la volonté politique et les méthodes appropriées.

Et gérer les affaires courantes

Le Gouvernement de transition est chargé d’administrer les affaires courantes. En font partie le désendettement de l’Etat vis-à-vis de ses fournisseurs, notamment la Jirama et les entreprises de BTP, la stabilisation du calendrier scolaire et universitaire, la préparation du recensement national indéfiniment reporté, le rétablissement de la sécurité, l’assainissement des corps les plus contaminés par la corruption (police et gendarmerie, justice, domaines, etc.). L’actuel conflit entre le SMM, la Police Nationale et les Gardes Pénitentiaires de Tuléar illustre, une fois de plus, le manque scandaleux du plus élémentaire sens de la responsabilité et de l’honneur de la part de la classe politique : devant pareil dysfonctionnement, et dans un Etat de droit, le ministre concerné présente immédiatement sa démission. Au lieu de quoi, chacun s’accroche à sa chaise, avec des arguments minables et faux.

***

Telles sont les quelques conditions essentielles requises pour clore la Transition. Le SeFaFi prend sa part de l’incitation faite à la société civile de se charger « du suivi et du contrôle nationaux de l’application de cette Feuille de route, jusqu’à la fin de la période de transition » (article 28). Pour éviter à cette Transition de déboucher sur une crise encore plus aigüe et plus longue et pour redonner un peu d’espoir à l’ensemble du peuple malgache en cette période des festivités.

Antananarivo, le 22 décembre 2011

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« LA FEUILLE DE ROUTE », ET APRES ?

Une feuille de route a été signée, après bien des péripéties : l’histoire en fera le bilan. En attendant, la pagaille continue. L’encre des signatures n’était pas encore sèche, que déjà s’affrontaient les interprétations divergentes. Pire, certains ont tenu des propos en totale contradiction avec la feuille de route qu’ils venaient d’adopter. A se demander s’ils ont lu ce qu’ils ont signé, et s’ils ont compris ce qu’ils ont lu. L’incompétence et la mauvaise foi de notre classe politique continuent à prendre le peuple en otage dans cette crise interminable.

En ces temps d’incertitude, et pour couper court aux dérives, le SeFaFi tient à recentrer l’attention sur deux points qui conditionnent le cheminement vers une sortie de crise effective : la bonne compréhension de l’élargissement des institutions transitoires, et la détermination d’un calendrier électoral.

De l’élargissement des institutions transitoires

De tous les articles de la feuille de route, le numéro 7 est sans conteste celui qui a donné lieu au plus grand nombre d’interprétations erronées. Ledit article dispose que, « pour l’élargissement de la composition des autres institutions de la transition, comme le Congrès de Transition (CT), le Conseil Supérieur de Transition (CST) et la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI), les Acteurs Politiques Malgaches (…) sont invités à présenter une liste de personnalités parmi lesquelles le Président de la Transition nomme les membres de ces institutions ». Nommer les membres de ces institutions par le président de la Transition, veut dire renouveler leur composition de telle manière que l’ensemble des acteurs politiques y soient représentés. Il s’agit donc d’un élargissement exclusivement qualitatif et idéologique, et non pas d’un élargissement quantitatif qui ajouterait de nouveaux membres aux membres actuels de ces institutions. Par ailleurs, l’Article 23 dispose clairement qu’« aucun Acteur Politique Malgache partie prenante ou non à cette Feuille de route ne peut ni ne doit s’arroger un droit de veto à l’exécution de cette Feuille de route durant la période de transition ».

Cela devait suffire pour annihiler tout autre scenario que celui dessiné par l’acte signé le 16 septembre 2011.

La vénalité des uns et l’opportunisme des autres ont hélas échauffé l’imagination de la plupart des camps impliqués. L’éventualité d’un Parlement bicaméral de 600 membres a ainsi été évoquée. Les caisses de l’Etat supporteront-elles les dépenses faramineuses occasionnées par cette gabegie ? Ces pseudo-députés et sénateurs qui n’ont aucune légitimité méritent-ils que le contribuable se saigne à blanc pour eux ? Il faut arrêter le massacre et suivre à la lettre les directives de la feuille de route. Car les résultats des nombreuses sessions du CT et du CST sont bien maigres et souvent discutables. A titre d’exemple, pourquoi la loi sur les partis politiques n’est-elle applicable qu’à l’issue de la transition ? Il convient de la modifier pour qu’elle soit immédiatement applicable. Cela permettra de réduire le nombre des groupuscules politiques, et de rentabiliser les futures sessions parlementaires de nos législateurs proclamés.

Donc : élargir, oui ; mais raisonnablement et pour garantir la représentativité de toutes les forces politiques. Le SeFaFi propose alors de réduire l’effectif des deux chambres pour le rapprocher ce qu’il était avant la crise : 127 CT et 33 CST. Pour la CENI par contre, il serait plus judicieux, en prévision des prochaines élections, d’étoffer le staff technique composé de juristes, de magistrats et de spécialistes en élections. Et de remettre les politiques à leur place, en limitant leur rôle à celui de simples observateurs, non de décideurs, conformément aux statuts actuels de la CENI.

Une mise au point s’impose également à propos de la désignation du premier Ministre, dont processus de sélection risque de dévaloriser la fonction. La formule du consensuel et de l’inclusif est à jeter aux oubliettes car personne ne pourra remplir ce critère. Les contestations fusent déjà de toutes parts, alors que la liste des candidats vient à peine d’être établie. Le profil du prochain locataire de Mahazoarivo peut être dessiné en quelques mots : quelqu’un qui ait la capacité de mener un gouvernement de transition jusqu’au bout de ses tâches, en expédiant les affaires courantes et en sauvant le peu de dignité qui reste à l’État malgache jusqu’au retour à l’ordre constitutionnel ; et quelqu’un qui ne soit pas à la solde des groupes de pression et autres groupements politiques. La logique exige aussi que le futur premier Ministre ne soit pas candidat aux élections présidentielles.

Ce sera un gage de son objectivité, une garantie supplémentaire de sa détermination à servir l’Etat sans faire de son poste un tremplin vers la magistrature suprême. Et cela évitera le désagrément majeur d’avoir à trouver encore un nouveau premier Ministre dans quelques mois, puisque tout candidat à la Présidence doit démissionner 60 jours avant le jour de l’élection. Mais il est à craindre que les politiciens s’insurgent contre cette idée, qui réduirait considérablement leur marge de manœuvre. Chacun le constate, le sens du service public et de la patrie se fait rare à Madagascar…

Du calendrier des élections

Le message est clair : le pays doit aller aux élections – législatives et présidentielles– dans les meilleurs délais possibles (Art.10-g), dans les conditions garanties par la feuille de route et par la communauté internationale. Etant donné que l’investiture du Président élu marque le terme de la Transition (Art.29), il est logique que les présidentielles soient organisées après les législatives. En plus de réconcilier les citoyens avec les urnes, la tenue préalable des législatives permettra aussi de démontrer la fiabilité (ou non) du système électoral mis en place par la CENI et de faire connaître la véritable représentativité de chacun des innombrables partis politiques. Le SeFaFi insiste donc pour que les élections présidentielles se tiennent avant le 30 novembre 2012, ce qui suppose la tenue des législatives au moins quatre mois avant. Et que l’on ne prétende pas que c’est là une tâche impossible vu les délais impartis, car cela fait déjà deux ans que ce prétexte bancal sert à justifier l’inaction. Le peuple malgache est en droit d’attendre que les autorités mettent autant de zèle dans la préparation d’élections crédibles que dans la répartition des sièges au Parlement de transition.

Dernier impératif, les élections législatives et présidentielles ne devront en aucun cas être jumelées : cela ne ferait que renforcer la confusion qui existe déjà dans l’esprit des électeurs. Les élections régionales et les communales, quant à elles, pourront être programmées en 2013, le mandat des maires prolongé d’autant pour que soit assurée la continuité des affaires publiques.

La Feuille de route a été signée. Et après ? La vigilance est de mise car le pays n’est pas encore tiré d’affaire. Il va même au-devant de graves problèmes si les politiciens et les autorités ne font pas rapidement preuve de responsabilité, d’humilité et de détermination, pour achever une transition qui n’a que trop duré.

Antananarivo, 21 octobre 2011

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UNE ELECTION CETTE ANNEE

Plus que jamais, la crise subie depuis janvier 2009 semble sans issue. La médiation de la SADC, en laquelle beaucoup avaient mis leur espoir, est embourbée en raison de l’ambigüité entretenue autour de la feuille de route et du désintérêt des chefs d’Etat pour la question malgache, dont témoigne le récent sommet de Luanda les 17 et 18 août 2011. Faut-il baisser les bras et se résigner, en attendant les inévitables mouvements de rue, voire même la guerre civile ? Pendant ce temps, mouvements, partis, associations et autres groupements citoyens se concertent et proposent de nouveaux schémas de sortie de crise aussi variés qu’improbables. Face à cette situation d’éclatement et d’instabilité, le SeFaFi se propose de revenir sur les repères qu’il a déjà indiqués, afin d’y voir plus clair dans le présent et l’avenir. A partir de là, au lieu de revenir à la case départ, il lui paraît préférable de partir des acquis de ces derniers mois pour esquisser une solution à la fois rapide et démocratique aux problèmes de la transition.

Les convictions du SeFaFi

Le préalable de toute réflexion sur l’impasse actuelle et le moyen de s’en sortir, est que la sortie de crise ne peut et ne doit pas être le fait des seuls politiciens.

Sinon, le pays se retrouvera dans les mêmes difficultés d’ici quelques années, les citoyens ayant été mis devant le fait accompli des combines d’états-majors, là où il aurait fallu les associer à un règlement qui les concerne au premier chef. La société civile peut y aider par ses propositions, à condition toutefois de se cantonner dans une stricte neutralité et de ne pas outrepasser son champ d’action. L’expérience récente prouve enfin que les pays étrangers, tout comme une « communauté internationale » de quelques États riches et influents, ne sont pas davantage capables de trouver la formule qui permettra à Madagascar de surmonter ses blocages. La seule issue inclusive et consensuelle est la démocratie, c'est-à-dire l’expression du suffrage populaire, le choix des citoyens. Le 15 septembre prochain sera célébrée la journée internationale de la démocratie : elle pourra être mise à profit pour réfléchir à l’impérieuse nécessité de restituer son pouvoir au peuple malgache. Ce ne sont pas les combinaisons d’états-majors qui font la démocratie et mobilisent le citoyen, mais les consultations électorales libres et transparentes. La sortie de crise devra nécessairement se faire par les urnes, et c’est en vue de cet objectif que doivent être mobilisés dès à présent, et au plus vite, les efforts de tous, société politique et société civile confondues.

Deuxième conviction du SeFaFi : pour sortir de la crise, il est indispensable d’organiser une élection cette année 2011. Depuis mars 2009, le seul scrutin a été le référendum constitutionnel de novembre 2010 ; malgré ses défauts et les conditions critiquables de son vote, cette constitution est aujourd’hui le texte de référence le plus légitime que nous ayons, d'autant qu'il permettra, dans le futur, des amendements démocratiques. Cette voie doit être poursuivie avec pragmatisme, nul ne pouvant se prévaloir aujourd’hui d’avoir été élu par des élections libres et transparentes ces dernières décennies. Avec un minimum de bonne foi démocratique, l’échéance de 2011 peut être tenue. Le SeFaFi a déjà proposé (1) que cette élection soit celle des députés de la future Assemblée nationale de la IVème République. La raison, évidente, est que les législatives sont des élections nationales permettant de mettre en place deux institutions majeures de la vie publique : une Assemblée nationale qui, en vertu de l’article 166 de la Constitution, dispose de l’intégralité du pouvoir législatif pendant la période transitoire ; et un Premier ministre qui, selon l’article 54 de la même Constitution, devra être nommé par le Président sur présentation de l’Assemblée nationale et qui proposera les membres de son Gouvernement au Président. Ainsi seront installées dès 2011 deux institutions essentielles au fonctionnement démocratique de l’Etat.

En troisième lieu, le fait de commencer par les élections législatives plutôt que par les présidentielles permet de clarifier le paysage politique et de couper court à la prétention de nos 300 partis politiques d’être chacun représentatif des citoyens malgaches. Les législatives constituent le moyen le plus sûr de vérifier la représentativité des partis politiques, laquelle sera donnée par le pourcentage des voix que chacun arrivera à réunir au niveau national. Et le SeFaFi espère que ces partis auront tous le courage civique d’affronter cette épreuve de représentativité, faute de quoi ils perdront toute crédibilité. Cette démarche est motivée par le même article 166 de la Constitution, qui stipule qu’« en attendant la mise en place du Sénat, l’Assemblée nationale a la plénitude du pouvoir législatif ». Par ailleurs, « les modalités d’élection et de désignation de ses membres (du Sénat) sont fixées par une loi organique » (Art. 84). Il reviendra ainsi à l’Assemblée nationale élue, seule habilitée à voter les lois organiques, de préciser ces modalités.

Quant aux élections territoriales, municipales et régionales, elles constituent des scrutins locaux et régionaux, alors que le but d’une Transition est de doter le pays d’institutions nationales gérées par les élus issus du nouveau rapport de forces politiques. Aussi la prorogation d’un an du mandat des maires est-elle la solution la plus simple pour régler ce problème de démocratie locale.

Pour qu’un accord puisse se faire sur l’organisation des élections législatives, devra être levée au préalable la question du calendrier électoral. Il revient au Gouvernement, et à nul autre (Commission Électorale Nationale Indépendante -CENI- ou partis politiques), de publier le décret de convocation des électeurs trois mois avant le jour du scrutin. Cette responsabilité est politique, et elle doit constituer la priorité d’un Gouvernement de transition qui assume ses responsabilités et ne s’en décharge pas sur les autres. Or pour que les législatives puissent être tenues avant la saison des pluies, il faut que le décret de convocation soit publié avant la fin du mois d’août. Si les tenants actuels du pouvoir s'y refusent, pourront lui être imputés à juste titre et l’allongement sans fin de cette transition, et l’échec probable tant de la HAT que du pays tout entier. Et le SeFaFi espère que le nombre des députés restera le même que pendant les législatures précédentes, soit 127. Gonfler le chiffre des députés ne relève pas de la compétence des instances de Transition, alors que la pauvreté générale du pays n’autorise pas à des dépenses inconsidérées au profit d’une minorité.

(1) Voir, dans notre communiqué du 9 juillet 2011 : Contribution à une sortie de crise, le paragraphe « Pour en sortir, l’arbitrage du peuple ».

Les élections, une obligation citoyenne

Outre la fixation urgente d’un calendrier électoral, se pose la question de l’organisation des élections. Jusqu’ici, le ministère de l’Intérieur avait assumé seul cette responsabilité, avec les abus connus de tous : listes électorales trafiquées, recours aux ordonnances, partialité des médias publics, utilisation des moyens de l’Etat en faveur des candidats du pouvoir, candidats arbitrairement refusés, panne d’électricité pendant la nuit du dépouillement, inversion des résultats, refus de prendre en compte les plaintes des partis et des observateurs, etc.

A ce titre, la création de la CENI représente une avancée démocratique essentielle.

Pour autant, il serait naïf de croire que les problèmes sont définitivement résolus, et bien des critiques émises à l’égard de la composition et du fonctionnement de la CENI sont justifiées. Les identifier et y porter remède au plus vite est possible, avec un minimum de volonté politique.

Les ambigüités doivent d’abord être levées : contrairement à ce qu’affirment certains détracteurs qui lui reprochent d’être juge et partie, la CENI n’a aucune fonction d’observation électorale. Cette tâche revient aux associations spécialisées, nationales et internationales, dont la neutralité doit être irréprochable.

Et en matière d’observation électorale et d’éducation citoyenne, Madagascar dispose de la compétence et de l’expérience du KMF/CNOE (Comité national d’observation des élections). Le SeFaFi est convaincu qu’il saura les mettre au service des prochains scrutins électoraux et de la démocratie de la Grande Île.

C’est à des associations de ce type qu’il revient de faire la sensibilisation civique, et non pas à des ministres de transition qui, juges et parties dans le futur débat électoral, en profitent pour faire leur précampagne électorale aux frais de l’État.

Une deuxième suspicion touchant au rôle de l’État doit être levée. Il va de soi que la CENI ne peut pas tout faire, et n’a pas pouvoir sur les fonctionnaires dont le concours est indispensable à la bonne réalisation de ses tâches. Il est normal que des agents électoraux de la CENI soient appelés à collaborer avec des membres des fokontany ou des agents de collectivités décentralisées ; mais la responsabilité ultime en matière de listes électorales, de bureaux de vote, de bulletins électoraux ou autres, revient à la CENI. Il lui appartient également de faire connaitre dès à présent la manière dont seront présentés les bulletins uniques et d’en vulgariser des modèles adaptés à chaque type d’élection, pour que les électeurs ne soient pas pris au dépourvu le jour du vote.

Une troisième préoccupation mérite d’être évoquée : elle concerne la composition des membres de la CENI. La compétence, la représentativité et l’indépendance de certaines personnalités sont contestées. De sorte qu’il semble opportun non pas tant d’élargir l’effectif de la CENI (le trop grand nombre n’aide pas au bon fonctionnement) que de la recomposer. Et s’il n’y a pas lieu de céder aux revendications intéressées des innombrables partis ou alliances de circonstance de partis, la recomposition de la CENI devra tenir compte de la compétence et de la neutralité des personnes plus que de leur militantisme (ou présumée représentativité) politique. Sachant enfin que trois places sont réservées à l’opposition au sein de la CENI, il est à espérer que cette opposition reviendra sur son refus de l’arbitrage électoral, motivé par des raisons qui ont peu à voir avec le sens civique et la conviction démocratique.

Un autre souci, également lié à une véritable indépendance de la CENI, concerne son budget. Ici s’impose l’arrêt définitif de la comédie des donations faites par des ministres ou des partis politiques. Si la CENI est financièrement indépendante, elle n’a pas besoin de ces donations, qui ne sont que des moyens de pression indirecte au profit du pouvoir en place. Ces pressions déguisées sur la CENI sont inacceptables. Concernant son fonctionnement financier, la CENI doit apprendre à mieux prévoir ses dépenses et à recourir davantage à des appels d’offres locaux pour ne pas être prisonnière de la pesanteur des procédures.

Reste la délicate question de l’éligibilité des candidats. Sont en cause ici, faut-il le préciser, les candidats condamnés pour des raisons exclusivement politiques, dans le but de les écarter du suffrage universel. Si par contre ces condamnations découlent de faits crapuleux tombant sous le coup de la loi, pourquoi des hommes politiques bénéficieraient-ils d’une impunité qui est refusée à tout autre citoyen ? La classe politique doit impérativement se conformer au principe démocratique qui veut que nul n’est au-dessus de la loi. Par ailleurs, l’amnistie ne constitue un droit pour personne et son utilisation est réservée aux seules assemblées issues d’un suffrage populaire. Le CT (Congrès de la Transition) et le CST (Conseil Supérieur de la Transition), dont les membres sont nommés, n’ont aucune légitimité pour voter une loi d’amnistie : cela reviendrait pour leurs membres à s’autoamnistier, ce qui est juridiquement inacceptable et moralement condamnable. Et il faut rappeler que certains actes ne sont pas amnistiables - il en est ainsi des crimes de sang et des crimes économiques. Si une Assemblée nationale est élue cette année 2011, elle pourra se consacrer à ses tâches prioritaires : loi de finances 2012, loi d’amnistie et lois organiques. Ainsi, les élections présidentielles se tiendront dans un climat apaisé et conforme à l’État de droit.

En conclusion, le moment est venu pour chacun de prendre ses responsabilités pour sortir le pays du marasme et de l’incertitude dans lesquels il est plongé. Cela ne se fera, le SeFaFi ne cessera de le répéter, que par le recours au choix du peuple et donc des élections démocratiques, libres et transparentes.

Pour cela, les règles du jeu devront être claires et admises par tous. Des progrès ont été faits en ce sens, il reste encore deux conditions à remplir qui peuvent être réalisées dans les plus brefs délais : que ces règles soient perfectionnées avec le concours actif de tous les démocrates, et que toutes les forces politiques acceptent de participer au verdict populaire, et de le respecter, quel qu’il soit.

Dans ce but, il conviendra aussi d’ériger au plus vite le Conseil du Fampihavanana malagasy prévu par l’article 168 de la Constitution. Outre son rôle dans le processus de réconciliation nationale, il pourrait faire fonction d’arbitre et de recours électoral. Tenant la place «exceptionnelle et provisoire» assignée par la feuille de route à une « Cour Électorale Spéciale », il serait chargée du contentieux électoral, laissant à la Haute Cour Constitutionnelle la seule proclamation des résultats définitifs des prochaines élections législatives et présidentielles.

Dernière suggestion : que la société civile s'investisse dès à présent dans la mise en place du Conseil Économique, Social et Culturel, qui la concerne au plus haut point et dont elle est grandement responsable. Oui, il revient à tous, acteurs politiques ou citoyens de la société civile, de s’engager dans le processus de sortie de crise sans chercher à le contrôler. La réponse des uns et des autres montrera s’ils veulent le progrès de la nation ou la préservation d’intérêts particuliers.

Antananarivo, 25 août 2011

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CONTRIBUTION À UNE SORTIE DE CRISE

Après deux ans et demi de transition, le pays est toujours dans l’impasse. Si la « feuille de route » a longtemps entretenu l’espoir d’une issue satisfaisante, force est de constater aujourd’hui qu’elle ne fait plus l’unanimité. Parallèlement, l’action des pouvoirs publics est loin de répondre aux critères de la « bonne gouvernance » attendue, à savoir l’Etat de droit, la démocratie, la participation, la redevabilité, la transparence, la décentralisation, la vision stratégique, etc.

L’État est-il dirigé ?

Plus que jamais, Madagascar vit dans l’anarchie et la corruption. Cette situation ne semble guère préoccuper les dirigeants, soit totalement indifférents, soit incapables d’assumer les plus élémentaires responsabilités. C’est d’abord le cas de la justice. Prétendre que les auteurs du « trafic de bois de rose » ont été identifiés mais que leurs noms ne peuvent être divulgués au motif que l’instruction est en cours, est peu crédible. Dans d’autres dossiers, on ne s’est guère soucié du secret de l’instruction, en révélant au public les noms des inculpés. A présent, le BIANCO, l’ONI et le Ministère de la Justice se renvoient la balle. Le citoyen en conclut que les plus hautes instances de l’État, seules en mesure d’imposer le silence et de laisser faire les trafics, sont complices. Le président de la HAT a promis la lumière sur ces détournements massifs et sur la corruption qu’ils supposent, on attend qu’il tienne parole. Il en va de même pour les cas de pédophilie et d’abus sexuels sur mineurs : à notre connaissance, aucune affaire touchant des politiciens en vue et des étrangers « protégés » n’a été prise en compte par la justice.

L’incapacité de gouverner se manifeste à présent dans les plus hautes sphères de l’État. Alors que le premier Ministre avait interdit aux nouveaux ministres de remanier le staff technique de leur ministère, trois d’entre eux ont sciemment enfreint cet ordre, et s’en sont publiquement vantés, sans la moindre réaction de la Primature. Autre exemple : la mise en place envisagée d’un nouvel organisme chargé de chapeauter la CENI, au prétexte que cette dernière ne ferait pas correctement son travail.

Plutôt que de créer une nouvelle institution budgétivore, mieux vaudrait améliorer l’existant et obtenir une plus grande transparence dans la gestion du budget alloué à la CENI, jusque dans ses moindres démembrements. Car s’il est normal que le personnel ne perçoive sa rémunération qu’après le service accompli, il convient aussi de payer ses indemnités de déplacement avant le départ en mission : les déplacements étant fréquents, les employés ne peuvent pas en avancer les frais.

Un constat analogue peut être fait en matière de sécurité. Les forces de l’ordre sont manifestement débordées. Comment pourrait-il en être autrement, sachant que certains de leurs éléments viennent grossir les rangs des malfaiteurs ? Pourtant, aucune affaire les impliquant n’a abouti au tribunal.

On retrouve la même anarchie au niveau des investisseurs : certains étrangers agissent impunément, au mépris de la loi et de l’environnement. Dans l’enseignement, la navigation à vue s’est imposée : plus aucune visibilité pour l’enseignement supérieur, plus de politique bien assise pour les niveaux inférieurs ni même de calendrier scolaire pour les élèves. L’État n’exerçant plus ses prérogatives, chacun s’estime autorisé à agir comme bon lui semble, les plus forts au détriment des plus faibles évidemment.

Pour en sortir, l’arbitrage du peuple

La société civile tente d’apporter sa contribution au dénouement de la crise. Mais nombre d’initiatives se heurtent à la politisation de certaines de ses composantes. Car la société civile n’a pas, par nature, à s’impliquer dans l’élaboration d’un schéma politique dont elle serait partie prenante.

L’expérience malheureuse du FFKM en 1991 a montré les limites de l’exercice.

Pour sa part, le SeFaFi a demandé depuis des mois la tenue rapide d’élections, aux conditions qu’il n’a cessé d’exposer : code électoral, neutralité (CENI), transparence, financement, sanctions, observation de la communauté internationale, etc. Et s’il préconise de tenir les législatives avant les présidentielles, ce n’est pas seulement à cause de la difficulté d’emploi du bulletin unique, au cas où les présidentielles étaient jumelées avec les législatives. C’est essentiellement pour que la représentativité nationale des hommes et des partis politiques soit garantie par le suffrage universel. A l’inverse, commencer par les élections présidentielles fausserait le verdict des législatives, car l’élection des députés serait inévitablement influencée par le résultat des présidentielles.

Or, après deux ans d’annonces toujours démenties et de promesses jamais tenues, c’est aujourd’hui le silence total sur le calendrier électoral. Et chaque semaine qui passe repousse les échéances électorales à 2012, et donc à une quatrième année de transition, ce que refuse la plupart des citoyens. Il faut en conclure que les responsables de la transition ne songent qu’à conserver leur pouvoir de fait et les avantages qu’ils en retirent à des fins personnelles ; et qu’ils ne se soucient ni de la pauvreté et de l’insécurité croissante de la population, ni de la légitimité de leur pouvoir, ni de la reconnaissance internationale…

D’où la proposition du SeFaFi d’organiser impérativement des élections législatives avant la fin de l’année, au plus tard en novembre. Ainsi une Assemblé nationale légitime pourra adopter en priorité les lois organiques et une loi d’amnistie - lesquelles relèvent exclusivement d’une Assemblée élue. Il lui reviendra, après avoir présenté (« par le parti ou le groupe de partis majoritaire à l’Assemblé nationale », Constitution, art. 54) le premier ministre de son choix, d’exercer la plénitude de son pouvoir de faire les lois, en mettant un terme à la pratique honteuse qui consiste à entériner sans amendements les textes élaborés par l’exécutif. Les élections présidentielles devront alors se tenir dès la fin de la saison des pluies. Quant aux maires dont les mandats arrivent à expiration en décembre prochain, il serait inopportun et contestable de les remplacer par des délégations spéciales; mieux vaudra prolonger leur mandat et celui des conseillers jusqu’à la tenue, dans les plus brefs délais, des élections territoriales.

Personne ne peut décemment récuser l’arbitrage du peuple. Mais pour que cet arbitrage soit valable, l’ensemble des parties prenantes doit pouvoir juger de l’objectivité du processus électoral, et en accepter le verdict. Il faut donc leur donner toute leur place en réaménageant la CENI, et leur offrir plus de garanties en acceptant la supervision des observateurs étrangers. Si tel est le cas, aucun démocrate ne pourra s’opposer à une élection, ni en contester le verdict.

Antananarivo, le 9 juillet 2011

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SOCIETE CIVILE, SOCIETE POLITIQUE: QUELLE REPRESENTATIVITE ?

Une mise au point s’impose. Au fil des mois vécus sous le régime de la Transition, fleurissent les déclarations et les prises de position signées par de nombreux partis politiques ou divers groupements civils. Certains de ces partis ou groupements sont de création récente et dépourvus de tout soutien populaire.

D’autres publient des textes non signés. La plupart ne dispose d’aucune représentativité et n’est soumis à aucune redevabilité. A défaut d’un assainissement encore difficile, il est plus qu’urgent de procéder à un effort de clarification et d’honnêteté citoyenne.

Une société civile improvisée

Les auteurs de communiqués signés OSC (Organisation de la Société Civile) s’érigent en représentants de toutes les composantes de la dite-société civile à Madagascar. Or nul n’est autorisé à parler au nom d’une entité dont les éléments légalement constitués n’ont pas été consultés. Une tentative analogue avait été menée, du temps du Président Ravalomanana, par l’AOSC (Alliance des Organisations de la Société Civile). S’arroger le monopole de la représentation de l’ensemble de la société civile constitue à la fois un abus de pouvoir ou une usurpation, et une tentative vouée à l’échec car les intérêts particuliers qui caractérisent la société civile sont par nature pluriels et souvent contradictoires.

Il en est ainsi du communiqué diffusé le 21 mai 2011, après une «soi-disant» Assemblée générale de la Société civile de Madagascar, même si le fond pourrait en être tout à fait pertinent. Il en va de même avec le « mémorandum sur la sortie de crise à Madagascar » publié par le CCOC (Collectif des Citoyens et des Organisations Citoyennes) le 19 mai 2011, qui ne comporte aucune signature et ne fait mention d’aucune concertation de ses membres, apparemment mis devant le fait accompli – par qui ?

Par ailleurs, la CNOSC (Coordination Nationale des Organisations de la Société Civile) a été créée le 23 juillet 2009 par l’AOSC, le CCOC et le KMF/CNOE (Comité National pour l’Observation des Élections). Quelles sont alors les exigences de redevabilité que se sont donnés les dirigeants de la CNOSC ? A titre d’exemple, après que le CNOE se soit retiré de la CNOSC il y a quelques mois, il aurait été opportun de réunir les entités restantes pour leur faire connaître les raisons de ce désistement et expliquer pourquoi un groupement qui s’appelle FINOANA a pris la relève de la CNOSC ; par la même occasion, les membres de la CNOSC auraient pu maintenir ou renouveler leurs représentants, et leur donner un mandat précis.

La société civile veut donner des leçons de civisme à la classe politique, ce qui est plus que louable. Il lui faut toutefois respecter au préalable les critères de sa propre représentativité, se soumettre au principe de la redevabilité, et agir en toute transparence.

Une société politique autoproclamée

Le même constat peut être fait dans le monde politique, d’autant que le record antérieur de 200 partis politiques est pulvérisé, le pays en comptant actuellement plus de 300. Et cette pléthore de partis voudrait qu’on les prenne au sérieux ?

Chacun sait qu’il ne suffit pas qu’un parti soit légalement déclaré pour devenir représentatif. Sa crédibilité n’est acquise que lorsque son implantation territoriale est suffisamment étendue, et qu’une part significative des électeurs lui donne ses voix : en de nombreux pays, un parti qui ne réunit pas 5% des suffrages lors d’une consultation nationale et n’est pas implanté dans un pourcentage donné de collectivités décentralisées, n’est pas autorisé à se présenter à l’élection suivante. Aujourd’hui pourtant, des chefs de partis limités à la capitale et à quelques grandes villes sont régulièrement consultés par les médias ; d’autres font des tournées à l’étranger, alors que leur formation politique est de création récente et ne s’est jamais présenté à aucune élection.

Le problème vient aussi des médias, qui réagissent à une notoriété individuelle supposée, voire à d’autres arguments moins avouables, pour donner la parole aux uns, alors que d’autres sont ignorés. Sont ainsi régulièrement sollicités des politiques qui n’ont strictement rien à dire, qui ne représentent quasiment personne et qui ne brillent ni par leurs écrits ni par leurs actions… La médiocrité politique empire de jour en jour et vient assombrir un peu plus un contexte national déjà difficile.

C’est pourquoi le SeFaFi insiste à nouveau pour que les législatives soient les premières élections à être organisées pour la sortie de la crise, et qu’elles soient correctement mises en œuvre. Cela permettra de mesurer la représentativité des différents partis.

La transition qui s’éternise est un puissant révélateur des maux qui minent notre société. Le manque de crédibilité des acteurs publics, qu’ils soient de la société civile ou de la société politique, est l’un de ceux-là. Or la représentativité dépend du choix libre et transparent des représentants par ceux qu’ils représentent: par la voie électorale pour les politiques, selon la logique associative pour la société civile. Car la gestion du collectif doit passer par la consultation des citoyens, et non par les arrangements négociés entre politiciens qui sont à la fois juge et partie. Aussi le SeFaFi souhaite-t-il que la période difficile traversée par le pays soit l’occasion pour les politiciens de se rendre plus crédibles, et pour les citoyens d’être moins crédules et plus exigeants par rapport à ceux qui prétendent les représenter et être à leur service.

Antananarivo, le 27 mai 2011

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SELON QUE VOUS SEREZ PUISSANT OU MISERABLE…

Le dimanche 15 mai 2011, tombait la nouvelle insolite de l’arrestation du directeur du FMI, inculpé pour agression sexuelle, tentative de viol et séquestration.

Dominique Strauss Kahn démissionnait de son poste quelques jours plus tard, avant d’être mis en examen par la justice américaine et d’obtenir une libération conditionnelle pour préparer son procès. Il faut savoir que sa fonction à la tête du FMI, sans doute parce qu’il n’est pas élu par des citoyens, ne lui vaut aucune immunité particulière. Il était pourtant l’un des hommes les plus influents au monde, à la tête d’une des plus importantes institutions internationales.

Le mardi 3 mai 2011, La Gazette de la Grande Île titre à la une : «Jao Jean accusé de viol sur mineure». Le quotidien rappelle les faits, qui datent du jour de Pâques, la complicité supposée du proviseur du lycée d’Antsohihy, la morgue du présumé coupable (« Je n’ai pas peur de vous, même Andry Rajoelina a peur de moi et c’est moi qui l’ai mis à cette fonction » - sic), et les pressions faites sur le père de la victime présumée, toujours introuvable à cette date. Si aucun démenti n’a été opposé à l’article, aucune suite ne semble avoir été donnée à cette affaire désormais relayée par de nombreux sites internet. Membre du Conseil Supérieur de la Transition, le présumé coupable est sans doute en session, comme si de rien n’était. Madagascar est loin d’être un Etat de droit, sa justice n’est guère indépendante, mais pareille situation est inacceptable.

Se pose alors la question de l’immunité parlementaire, désignant à la fois l’irresponsabilité parlementaire (qui empêche le parlementaire d’être être poursuivi, recherché, arrêté ou détenu en raison des opinions ou votes émis dans l’exercice de ses fonctions), et l’inviolabilité parlementaire (qui vaut au parlementaire de ne pas être arrêté, pour des actes délictuels ou criminels qu’il aurait commis en dehors de ses fonctions parlementaires, sans l’autorisation de l’Assemblée -pendant les sessions- ou du Bureau de l’Assemblée -hors session).

Le CST étant actuellement en session, il lui revient de se prononcer sur l’arrestation éventuelle du parlementaire suspecté, en vertu de l’article 73 de la constitution de la IVème République (qui s’applique aussi au Sénat, selon l’article 85) et de l’article 10 de la loi n° 93-004, du 21 janvier 1994 portant organisation de l’Assemblée nationale. A signaler que les faits s’étant produits hors session parlementaire, les poursuites contre le parlementaire pouvaient être déclenchées sans autorisation du Bureau de l’Assemblée (loi n° 93-004, art. 11).

Mais la question rebondit. Dans la mesure où ils ont été désignés, et non élus au suffrage universel, les membres du CST et du CT bénéficient-ils de l’immunité parlementaire ? En l’absence de texte précis, la question est ouverte.

Car les membres de ces institutions, même s’ils exercent les fonctions de députés et de sénateurs, ne peuvent pas bénéficier des statuts de ces derniers : il y a, dans « Les animaux malades de la peste », fable de La Fontaine (1621-1695), une différence entre fonctions et statuts. Or si la Constitution et l’Ordonnance n° 2010-010 relative à la mise en place du Parlement de la Transition semblent rattacher les fonctions du Parlement Transitoire aux fonctions du Parlement constitutionnel jusqu’à l’instauration de celui-ci, elles ne stipulent pas que les membres du Parlement Transitoire bénéficient d’une immunité parlementaire totale. En effet, les articles 7 et 15 de l’Ordonnance n° 2010-010 accordent « l’irresponsabilité parlementaire » aux membres du Parlement Transitoire, mais restent silencieux sur l’« inviolabilité parlementaire ». De plus, ni la Constitution ni l’Ordonnance n° 2010-010 n’accordent aux membres du Parlement Transitoire le statut de membres d’un Parlement constitutionnel.

De ce qui précède, on peut conclure que les membres du Parlement Transitoire ne bénéficient pas de l’ « inviolabilité parlementaire ». Ils peuvent donc faire l’objet de poursuites et d’arrestation dans le cadre d’une infraction délictuelle ou criminelle, sans avoir besoin d’une levée préalable de leur immunité parlementaire. En revanche, ils bénéficient de « l’irresponsabilité parlementaire » et ne sauraient donc êtres inquiétés pour les opinions et les votes émis dans le cadre de leurs mandats. L’Ordonnance n° 2010-010 précise toutefois que les membres du Parlement Transitoire doivent agir « dans un cadre juridique et éthique de façon responsable, respectueuse et conviviale » (art. 7 al. 2 et 15 al.

Une phrase qui ajoute un peu plus de flou à cette question, puisqu’il n’est pas précisé quelle serait la sanction en cas de non-respect de cette disposition.

Rappelons pour conclure que le viol, sur une mineure de surcroît, constitue un crime de la plus grande gravité. Des militaires et des hommes en armes du Congo démocratique sont actuellement poursuivis pour crimes contre l’humanité par le Tribunal Pénal International, en raison d’agressions sexuelles de ce type.

Or certains medias à Madagascar tendent à banaliser l’affaire Jao Jean, sous prétexte que ces pratiques seraient habituelles, notamment chez les hommes politiques.

Il y va de l’honneur de la Justice, de la classe politique et du pays tout entier, que cette affaire soit traitée sans compromission ni délais, en conformité avec la loi qui est la même pour tous.

Antananarivo, le 26 mai 2011

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QUELLES ELECTIONS EN 2011 ?

Le Président de la HAT l’a répété depuis un certain temps : 2011 sera une année d’élections. Tous ceux qui veulent en finir avec la crise, et une Transition qui n’en finit pas, n’attendent que cela. Mais plusieurs questions méritent d’être examinées au préalable, afin que Madagascar puisse connaître des élections véritablement transparentes et indépendantes, car le référendum du 17 novembre a révélé une grande marge d’amélioration dans les procédures électorales.

Listes électorales

D’après les leçons que l’on peut tirer du référendum, le premier dysfonctionnement concerne les listes électorales. On doit pointer tout d’abord, ici, la responsabilité des fokontany dans l’établissement de ces listes. Par ailleurs, la participation électorale étant un devoir civique, il revient au citoyen de vérifier si son nom est dans la liste et ne comporte pas d’erreur matérielle.

Dans l’actuel processus de mise à jour, les démembrements locaux de la CENI devront veiller à ce que les listes soient affichées à chaque étape de leur confection. Pour cela, nous proposons qu’elles soient accessibles aussi bien en dehors que pendant les heures de travail, ainsi que les samedis, afin que les électeurs puissent en vérifier l’exactitude.

Compte tenu de la mise à jour qui a déjà été engagée, une liste électorale conforme à ces exigences pourrait être arrêtée d’ici à la fin du mois de mai 2011.

Enfin, il serait juste et respectueux du choix des électeurs, lors du dépouillement et de la proclamation des résultats, de distinguer les votes blancs et les votes nuls. Le vote blanc est un acte positif du citoyen qui use de son droit de vote pour signifier qu’aucun des choix proposés ne lui convient. Cette démarche mérite d’être prise en compte et de figurer à part dans les résultats électoraux. Il n’en va pas de même du bulletin nul, qui, volontairement ou par accident, enfreint les règles électorales.

Commission Électorale Nationale Indépendante

La CENI est l’une des institutions de la Transition dont la création a suscité le plus d’espoir. Le texte qui l’institue ne comporte pas de défauts majeurs. Toutefois, la désignation de certains membres de cette Commission n’est pas conforme à son esprit. Par ailleurs, il est regrettable que les partis d’opposition continuent à ne pas vouloir y participer.

Il convient également de clarifier les relations de la CENI et de l’administration, en déterminant clairement qui a le pouvoir de prendre des décisions aussi importantes que la nature des papiers officiels à présenter pour voter, et les heures d’ouverture et de fermeture des bureaux de vote.

Et puisqu’il a été annoncé que 2011 serait une année électorale, il importe de procéder au plus vite à une large diffusion de la version définitive du Code électoral et de l’ordonnance instituant la CENI. Le peuple a le droit de connaître les règles exactes régissant des consultations qui le concernent en premier lieu.

Campagnes électorales et financements

Depuis quelques semaines, on constate une multiplication des campagnes de sensibilisation et de grands meetings organisés par des politiques. Nous sommes clairement dans une ambiance de pré-campagne.

La question se pose alors de savoir quels messages véhiculent ces rassemblements, étant donné que la plupart de leurs initiateurs ne sont ni élus ni formellement candidats. Il ne peut s’agir ni de comptes-rendus de mandats, ni de présentation de programmes politiques. Les discours en question ne peuvent donc être que populistes et démagogiques …

Cette ambiance de pré-campagne pose aussi la question du financement des campagnes électorales.

Certains tenants du pouvoir se constitueraient un trésor de guerre à cette fin. Cet état de choses remet à l’ordre du jour le sujet maintes fois soulevé par le SeFaFi, qui est l’adoption de lois sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales.

La finalisation et l’adoption de ces textes devront être inscrites dans la version définitive de la Feuille de route, parmi les tâches prioritaires du Congrès de la Transition et du Conseil Supérieur de la Transition lors de la prochaine session. Il y va de la crédibilité de ces institutions transitoires, qui doivent leur existence aux promesses de changement et de transparence. Tant que cette question du financement des partis et des campagnes électorales demeurera non règlementée, la méfiance des citoyens vis-à-vis des politiciens perdurera.

Calendrier électoral

En dépit des différentes assises et conférences organisées à grands frais, il est inconcevable et inadmissible que l’ordre des élections à tenir ne soit pas encore défini. Et cela, principalement, à cause de calculs politiques Dans la période actuelle, la représentativité politique est totalement brouillée. Avec plus de 200 partis dont la plupart n’ont jamais participé à une élection, Madagascar mérite de figurer dans le Livre Guinness des records. L’élection de députés est la seule façon de savoir ce que représente chacun d’eux. A l’inverse, lorsque les législatives suivent les présidentielles, le suivisme des électeurs fait que le parti du vainqueur est sur représenté au Parlement, ce qui prive ce dernier de ses nécessaires contre-pouvoirs.

Voilà pourquoi le SeFaFi insiste pour que l’on tienne les élections législatives avant les présidentielles. Les politiciens ont beaucoup à y perdre, mais la démocratie a tout à y gagner.

En toute hypothèse, la tenue simultanée des deux élections, en une même journée, est à proscrire. Les électeurs s’y perdront totalement, la campagne électorale sera brouillée et les opérations de dépouillement seront difficiles à gérer.

En termes de calendrier, cela implique la tenue d’élections législatives avant le 26 juin. La nouvelle Assemble nationale pourra ainsi se consacrer à l’élaboration des lois organiques prioritaires, notamment celles des collectivités décentralisées, et de la loi sur l’amnistie, les unes et l’autre ne pouvant être votées que par des élus au suffrage universel.

Les élections présidentielles pourront alors être tenues au plus tard en septembre-octobre, avant la saison des pluies. Quant aux élections sénatoriales et celles des collectivités décentralisées, elles seront organisées en 2012.

De l’amnistie

Tout le monde le sait mais personne ne veut l’avouer, la processus électoral est largement conditionné et bloqué par la question de l’amnistie. A ce propos, le SeFaFi rappelle deux principes essentiels :

- c’est le peuple qui amnistie, or les politiciens veulent s’autoamnistier. Il est inconcevable qu’une amnistie soit décrétée par des politiciens qui ne sont pas issus du suffrage populaire et qui ne s’expriment donc pas au nom du peuple. A ce titre, l’article 14 de la Feuille de route pour la sortie de crise à Madagascar modifiée le 16 février et spécifiant que « la loi d’amnistie sera ratifiée par le Parlement de Transition », constitue un recul démocratique manifeste. Et ce recul est en contradiction avec l’article 13 qui demande au pouvoir de Transition de « protéger et promouvoir les droits de l’homme à Madagascar » ;

- en outre, le détournement massif de deniers publics doit figurer dans la liste des crimes non amnistiables, au même titre que les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les crimes de génocide et d’autres violations graves des droits de l’homme et des libertés fondamentales. De ce point de vue, il est réconfortant de constater que la Feuille de route modifiée, dans son article 14, ne parle d’amnistie que pour les événements politiques, et intègre les détournements de fonds publics dans la liste des faits exclus de l’amnistie : « Sont exclus de l’amnistie les crimes contre l’humanité, les crimes de guerre, les crimes de génocide et d’autres violations graves des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que les détournements de fonds publics ».

Antananarivo, le 22 février 2011

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EN FINIR AVEC LA TRANSITION

Au seuil de 2011, Madagascar entame une troisième année de Transition, et ses politiciens sont toujours à la recherche d’une problématique sortie de crise. Il n’est sans doute pas excessif d’en conclure que les hommes politiques continuent à entretenir le désaccord, tout en profitant au maximum d’une situation qui profite au plus grand nombre d’entre eux. Après ces 24 mois d’attente, où en sont le pays, les institutions et les citoyens ?

A ce jour, trois avancées significatives vers une solution définitive méritent d’être mentionnées. La première est relative à la mise en place de la CENI (Commission Électorale Nationale Indépendante). Son inexpérience a été flagrante lors du dernier scrutin, et des améliorations peuvent être apportées à son organisation et à son fonctionnement. Ceci étant, il est souhaitable que les diverses oppositions acceptent de l’intégrer. La seconde concerne l’adoption de la constitution de la IVème République le 17 novembre 2010. Que l’on y soit favorable ou hostile, ce texte a été adopté au suffrage universel. En dépit de ses faiblesses et ses incohérences, il est désormais la constitution de Madagascar. La troisième avancée est la création des assemblées qui ont remplacé la Haute Autorité de Transition : le CT (Congrès de la Transition, 256 membres, censé tenir lieu d’Assemblée nationale) et le CST (Conseil Supérieur de la Transition, 90 membres, censé tenir lieu de Sénat). Ces institutions, dépourvues de légitimité populaire, sont là pour aider à la gestion courante du pays et à la mise en place rapide des institutions démocratiques prévues par la nouvelle Constitution. Elles ont donc vocation à disparaître au plus vite, au profit d’élus du peuple.

Halte à la boulimie des politiciens

Mais depuis la création de ces institutions provisoires, le citoyen médusé assiste à une surenchère boulimique dans la revendication des places et des avantages matériels. A croire que les politiciens ont perdu le plus élémentaire patriotisme, et jusqu’au sens de la mesure et de la décence. Leur seul objectif semble être de s’installer, pour consolider et accroître leurs privilèges

Du point de vue des rémunérations, circulent les chiffres les plus extravagants. Combien ont touché les membres de la HAT : 20 à 25 millions d’Ariary par mois, sans compter les indemnités en grand nombre, les per diem et autres avantages annexes ? Combien touchent les membres du CT et du CST? Le silence et le refus de transparence de la part de tous les concernés, anciens et nouveaux, inquiètent. Qu’ont-ils donc à cacher, sinon des rémunérations sans proportion avec le salaire normal d’un travailleur, même qualifié, et des avantages dont la seule liste connue devrait faire honte à leurs bénéficiaires : indemnités de logement et de déplacement, primes pour le carburant et les consommations téléphoniques, assistants parlementaires, etc.

La Transition justifie son arrivée au pouvoir par le besoin de changement manifesté par les citoyens. Les rémunérations des politiques devraient constituer le premier terrain d’application de cette volonté de changement, en mettant un terme aux dérives dont abusent les politiciens. Ils ne sont pas élus, faut-il le redire encore, et à ce titre ils ne sont représentatifs de rien et de personne. Leurs salaires devraient donc être à la mesure du travail fourni. Est-il normal que des politiciens anonymes gagnent plus qu'un chef d'entreprise ? Et si l’on demandait aux citoyens, qui payent leurs politiciens par le biais de leurs impôts, quel salaire maximum ils consentiraient à accorder aux politiciens, tous avantages compris ?

Et voici que ces gens, qui ne sont pas élus mais se targuent de parler et de décider au nom du peuple, marchandent à nouveau des prétentions exorbitantes.

Rien ne justifie des émoluments aussi faramineux, car ils n’ont pas à se déplacer dans une quelconque circonscription, n’étant élus par personne. Ils n’ont pas à faire de réunions pour rendre compte de leur activité parlementaire, puisqu’ils n’ont pas de mandat électoral. Mais peut-être exigent-ils ces subsides pour mieux financer leur future campagne électorale ? C’est dire assez que leur travail de congressistes et de conseillers est loin d'être leur préoccupation primordiale !

Du point de vue de l’effectif de ces assemblées, les prétentions sont tout aussi inacceptables. Ne parle-t-on pas de 500 congressistes, près de 200 conseillers, ainsi que d’un gouvernement dit d’union nationale de 50 ministres ? Notons au passage que le récent gouvernement d’union nationale de la Tunisie en Transition, mis en place quelques jours après la démission de Ben Ali, compte 19 membres. Pourquoi en faudrait-il 50 à Madagascar, et deux ans après le début de la Transition, sinon pour satisfaire le plus grand nombre d’ambitions personnelles ? Quel aveu d’incompétence et d’inconscience…

Outre qu’il n’existe dans la capitale aucune infrastructure pouvant accueillir en permanence une assemblée de 500 parlementaires (et combien d’assistants parlementaires ?), pourquoi multiplier ces postes finalement inutiles ? Les politiciens qui y ont été nommés n’ont aucun droit à y rester, ils peuvent être remplacés par d’autres qui seraient estimés plus « représentatifs » des différents courants politiques. Les partis concernés n’ont pour la plupart aucune légitimité populaire, ne s’étant jamais soumis au verdict des urnes. Il s’en créé tous les jours, groupuscules qui édictent leurs exigences : même si certaine presse se fait l’écho de l’un ou l’autre, de quel droit et au nom de qui parlent-ils ? En attendant que des élections législatives leur donnent et la légitimité de parler et le pourcentage des sièges auxquels ils peuvent prétendre, un représentant par parti officiellement enregistré serait largement suffisant au sein du Congrès de la Transition.

Enfin, Congrès et Conseil Supérieur de la Transition sont censés ne durer que quelques mois seulement, s’il est vrai que députés et sénateurs doivent être élus en 2011. A quoi bon, dans ces conditions, multiplier les sinécures ? Une institution transitoire se doit d’être limitée dans ses effectifs, exemplaire dans son fonctionnement, économe de l’argent public, modeste dans ses projets, et transparente dans ses décisions.

Il vaudrait la peine de procéder à une analyse coûts/avantages qui compare le coût d’une opération pour le pays, avec les avantages qu’il en retire. Si le coût de la Haute Autorité de Transition et des actuels CST et CT était et est sans proportion avec les résultats obtenus, à plus forte raison l’est-il si l’on considère le projet de porter ces assemblées à 100 et 500 membres, avec un gouvernement de 50 ministres. Il serait facile, si nos dirigeants autoproclamés pratiquaient la transparence promise, de savoir ce que coûtent ces institutions, et ce que coûteront celles à venir. En contrepartie, quel bénéfice en a tiré le pays, combien de lois ont-elles été adoptées, en quoi les conditions de vie de la population se sont-elles améliorées? Il conviendrait aussi de mentionner les mesures qui n’ont pas été prises, en matière d’insécurité interne, de pillage des ressources naturelles, de détournement de fonds publics, etc.

Sortir du transitoire

Il tarde aux citoyens de voir s’achever une Transition gérée par des responsables cooptés, que certains s’efforcent pourtant de faire durer. Car un citoyen veut des dirigeants issus de son libre choix, alors que les dirigeants désignés ne sont représentatifs que d’eux-mêmes.

Que le Président de la Transition prenne donc ses responsabilités : c’est à lui qu’il revient de mener cette Transition à son terme. Qu’il cesse d’apparaître comme l’otage d’un entourage à la réputation douteuse. Qu’il assume les pouvoirs que lui donne la nouvelle constitution dans ses dispositions transitoires (art.165), pour imposer un cadre électoral réaliste et définitif. Depuis un an, le citoyen éberlué assiste au défilé d’échéances annoncées, jamais tenues, toujours reportées. A ce jour, aucune date n’a été respectée, et nul ne sait aujourd’hui, si ce n’est que 2011 est décrétée « année électorale », quand auront lieu les échéances majeures : législatives et présidentielles, municipales et régionales...

Ces reniements successifs ont un effet déplorable mais mérité sur la crédibilité des responsables de la Transition, et accréditent l’idée que leur seul objectif est de se maintenir à la place qui est la leur. Mener la Transition à terme implique, plus que jamais, l’imposition et le respect scrupuleux d’un calendrier électoral qui ne soit pas systématiquement remis en question. Il revient à ceux qui sont en charge de l’Etat d’obliger tous les acteurs à s’y conformer. C’est pour cela qu’ils sont en charge d’une Transition, afin qu’elle se termine au plus vite.

Se pose également, dans ce contexte, la question des relations qu’entretient la classe politique avec l’argent. Le Bianco a récemment fait savoir que seuls 7 ministres avaient satisfait à l’obligation de déclarer leur patrimoine au moment d’entrer en fonction. Il est logique d’en conclure que ceux qui ne se sont pas conformés à la loi ont des choses à cacher. Pourquoi la justice s’en prend-elle alors aux petits délinquants, lorsque ceux qui dirigent l’Etat ne se conforment pas à la loi ? De même, avant les élections municipales avortées du 20 décembre 2010, les candidats s’étaient insurgés parce qu’il leur fallait justifier de l’état 211-bis, qui prouve qu’ils ont bien payé leurs impôts et leurs taxes ; et le pouvoir de la Transition avait cédé à leurs demandes, les dispensant de cette obligation. Les citoyens savent désormais que non seulement la grande majorité de nos hommes politiques ne sont pas en règle avec le fisc, mais que le pouvoir entérine cette illégalité flagrante de la part de futurs élus du peuple ! Nos hommes politiques n’auraient-ils donc plus ni déontologie ni éthique ?

Ce qui est transitoire ne doit pas durer. Une Transition de deux ans, sans qu’aucun scrutin pour la mise en place d’institutions pérennes n’ait été tenu, témoigne de l’échec de l’ensemble de la classe politique. Car les blocages viennent de tous les politiciens, qu’ils soient au pouvoir ou dans l’opposition. Le citoyen est largement au courant de ce qui oppose les uns et les autres : le partage du « gâteau ». En effet, chacun s’estime en droit d’accaparer les postes les plus juteux pour lui et pour les siens. Absence de vision nationale et mépris du bien commun, égocentrisme et boulimie financière, refus de laisser la place aux jeunes quand arrive le grand âge, tout cela concourt à l’échec des régimes successifs, qui pourrait être aussi celui de l’actuelle Transition. On ne cessera de le dire, toute la classe politique est en cause.

Il en va de même, malheureusement, de la société civile. Loin de respecter l’apolitisme qui fait leur identité, nombre d’associations sont devenues le paravent d’engagements politiques, ou l’antichambre en vue d’accéder au pouvoir.

Les mêmes travers se retrouvent dans le corporatisme des grands corps de la nation, au détriment de leur raison d’être qui est le service désintéressé au profit de la patrie et des citoyens. Les revendications de magistrats, enseignants chercheurs, militaires, médecins et paramédicaux, administrateurs civils, journalistes et ecclésiastiques, ne sont-elle pas le résultat de la surenchère des politiques ?

De ces travers, il est urgent de sortir. Mais qui le veut sincèrement ? Le SeFaFi propose alors de renoncer au mythe de l’unanimité, et de reconnaître que les opinions sont diverses et parfois inconciliables. Il faudra donc que ceux qui ne sont pas d’accord avec le régime de la Transition s’érigent en partis d’opposition et soient reconnus comme tels par les autres, dans l’esprit de l’article 14 de la nouvelle constitution. Ainsi seront reconnus les droits du pouvoir et la légitimité de l’opposition.

Antananarivo, le 21 janvier 2011

Mis en ligne par Jeannot Ramambazafy – 9 mai 2012

Mis à jour ( Jeudi, 10 Mai 2012 07:28 )  
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