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Home Editorial Madagate Affiche Christian Ntsay, BIT: « la croissance ne doit plus être le seul critère essentiel pour l’économie de Madagascar »

Christian Ntsay, BIT: « la croissance ne doit plus être le seul critère essentiel pour l’économie de Madagascar »

Discours intégral de M. Christian Ntsay, Directeur du Bureau de Pays de l’OIT

Pour Madagascar, les Comores, Djibouti, l’île Maurice et les Seychelles

Monsieur le Ministre de la Jeunesse et des Loisirs,

Cher collègue, Représentant du PNUD, représentant Madame le Coordonateur du SNU,

Messieurs les Secrétaires Généraux et Directeurs Généraux,

Mesdames et Messieurs les Chefs d’entreprise,

Mesdames et Messieurs les Responsables syndicaux,

Chers collègues du Système des Nations Unies,

Madame la Présidente de Ny Hoavi’Ntsika et toute son équipe,

Honorable assistance,

Chers amis,

Mesdames et Messieurs,

Il a été demandé au Bureau International du Travail que je représente de parrainer l’évènement d’aujourd’hui, et c’est avec plaisir que j’ai donné mon accord, et c’est avec fierté que je constate que mon appel d’il y a trois ans, à l’occasion du Grand Salon de l’Emploi, ici au Carlton, a reçu un écho particulier au niveau du gouvernement, du secteur privé, de la société civile et des travailleurs eux-mêmes, pour que l’on puisse continuer à redynamiser le marché du travail, malgré la crise et ses graves impacts sur l’économie et sur la société.

J’aimerais ainsi remercier chaleureusement Ny Hoavi’Ntsika pour son initiative de créer cet espace de rencontre entre les entreprises et les travailleurs, entre les entreprises et les jeunes, pour rendre concrets l’employabilité et l’emploi des jeunes, pour rendre concrètes les possibilités de reconversion des hommes et des femmes qui ont perdu leur emploi à cause de la crise, pour rendre concrètes les opportunités de création de petites entreprises pour tous ceux et celles qui souhaitent le faire.

A travers cet évènement, je loue le courage des femmes et des hommes, Chefs d’entreprise, Chefs d’établissement public, Présidents d’association, Candidats promoteurs d’entreprise, jeunes qui continuent de croire qu’il est nécessaire d’agir, qu’il est fondamental de ne pas laisser sur le bord de la route les jeunes de ce pays, qu’il est impératif de gagner le défi du courage, face au désespoir, de gagner le défi du travail ardu face à l’argent facile et à l’argent sale, de gagner le défi de la volonté de réussir face à la tentation généralisée du laisser-aller et de la médiocrité. Mesdames et Messieurs les Participants à ce Salon, soyez-en remerciés.

Chers Amis,

Mesdames et Messieurs,

La crise de l’emploi est devenue de plus en plus grave dans le pays depuis des décennies. Avant 2008, la croissance n’a pas engendré une diminution réelle de la pauvreté car la structure du marché du travail restait très déséquilibrée. Depuis 2008, avec la crise financière mondiales et la crise socio-politique intérieure, 336.000 emplois sont détruits ; 90% des emplois existants sont considérés comme emplois vulnérables ; 91% des entreprises formelles sont touchées par les effets de la double crise ; les investissements directs étrangers ont baissé de 51%.

Tout cela prouve qu’il était vital de modifier les modèles inefficaces de croissance au niveau du pays, et cela doit passer par une redéfinition des priorités ainsi que par une volonté politique de briser les dogmes du passé, basés sur la nécessité de faire à tout prix de la croissance. On a été trop dans l’idéologie, en définissant des politiques pour une croissance, mais pas assez du côté des stratégies orientées réellement vers les individus, les familles et les populations dans leur ensemble. La croissance est indispensable mais la croissance ne doit plus être le seul critère essentiel pour l’économie du pays.

Les crises à répétition dans le pays ont eu, certes, des causes multiples. Mais, nous sommes tout témoins, depuis l’indépendance, de la persistance d’un chômage trop fort, d’un sous-emploi honteux, et le problème de l’emploi en constitue l’une des causes déterminantes.

L’homme n’a pas été mis au centre des politiques ni des stratégies, comme l’emploi n’a jamais été une priorité, l’entreprise n’a jamais été une priorité, le travail n’a jamais été une priorité. Les mentalités n’ont pas évolué et la certitude des politiques fondées surtout sur la croissance a été néfastes pour Madagascar, car cette croissance n’a pas créé des emplois de qualité, notamment pour les jeunes ; cette croissance n’a pas réduit les inégalités et la pauvreté ; cette croissance n’a pas favorisé l’accès à l’égalité des chances. Or, et justement, il est temps de baser les critères de progrès économiques, en terme d’effets sur les individus, sur les familles et sur les populations.

Chers Amis,

Mesdames et Messieurs,

Madagascar vit une période difficile de son histoire avec la crise socio-politique, avec les incertitudes du lendemain et avec le désespoir de plus en plus grandissant.

Le pays doit, aujourd’hui, faire face à une aggravation de la crise de l’emploi des jeunes et c’est pourquoi l’OIT met en garde contre le « traumatisme » de toute une génération de jeunes confrontés à un dangereux mélange de chômage élevé, d’inactivité et de travail précaire ; l’OIT met en garde contre la multiplication des travailleurs pauvres dans le pays.

Aujourd’hui, la crise de l’emploi des jeunes a atteint des dimensions intolérables et inacceptables, avec notamment la hausse du chômage, la recrudescence des emplois de moindre qualité, la marginalisation croissante de la jeunesse et parmi les jeunes, le passage difficile de l’école à la vie active, la perte de contact avec le marché du travail. La crise de l’emploi des jeunes menace la sécurité et la paix de tous. La crise de l’emploi des jeunes constitue ainsi une menace pour la stabilité politique et la cohésion sociale.

En mai 2012, c’est-à-dire le mois dernier, l’OIT a organisé, à Genève, un Forum international sur l’emploi des jeunes, et les décisions prises seront présentées lors du prochain Sommet du G20, en juin, à l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre. A l’issue de ce Forum, tout le monde était unanime à reconnaître que les gouvernements doivent adopter des politiques favorables à l’emploi des jeunes. Cela passera par une palette d’initiatives qui comporteront des mesures visant à maintenir des personnes dans l’emploi ; a aider et à pérenniser les entreprises ; à accélérer la création d’emplois et la reprise de l’emploi, associées à la protection sociale, en particulier pour les plus vulnérables. Il faudrait une approche intégrée associant des politiques macro-économiques et des mesures ciblées qui concernent l’offre et la demande, la quantité et la qualité des emplois.

Chers Amis,

Mesdames et Messieurs,

Le BIT estime donc urgent d’adopter un nouveau paradigme, afin de promouvoir une croissance favorable à l’emploi, et à faire de l’emploi et de la protections sociale des objectifs-clés des politiques économiques et des stratégies de développement à Madagascar. Il faudrait que les jeunes occupent une place plus importante dans le processus d’élaboration des politiques, qu’ils suscitent un engagement politique suffisant et que des ressources adéquates leur soient consacrées.

C’est là le sens de l’engagement du BIT, et c’est là le sens du parrainage du BIT à ce Salon. Je crois en notre capacité à nous tous d’incarner la volonté de changer la société pour le meilleur. Je crois en notre mobilisation et notre conviction, chacun dans son domaine et chacun à son niveau, pour que Madagascar ait une jeunesse qui le mérite.

Enfin, pour terminer, je voudrais souhaiter plein succès à ce Salon car, avec 50 participants, 7.000 visiteurs sont attendus ; 1.000 emplois seront proposés et plusieurs offres de formation seront disponibilisées pour l’employabilité des jeunes.

Mesdames et Messieurs,

Je vous remercie.

Christian Ntsay, Hôtel Carlton, Anosy

7 juin 2012, dans le cadre du 6è Salon des Métiers et de la Formation

Mis à jour ( Dimanche, 10 Juin 2012 09:35 )  
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