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Madagascar. Plus jamais de répression entrainant mort d’homme pour des idées

7 février 2009-7 février 2010. Dix ans ont passé depuis le massacre devant le palais d’État d’Ambohitsorohitra qui a fait 48 morts -dont un jeune reporter cameraman- et des dizaines de blessés. Mais qu’est-ce qui a réellement conduit à un tel ras-le-bol populaire ayant amené toute une population à manifester au prix de leur vie ? Comme en 1972, en 1991 et en 2002 ? Le 3 février 2009, j’avais rédigé un article pour expliquer les vraies raisons de ce qui n’a jamais été un coup d’État. Non, il ne s’agit pas d’accabler encore plus le perdant du deuxième tour de l’élection présidentielle malgache de 2018. Il a d’ailleurs reconnu sa défaite immédiatement.

Mais il s’agit d’ouvrir les yeux de l’esprit (« masom-panahy ») des fanatiques membres du GTT et MCM -Malgaches vivant à l’extérieur Madagascar qui plus est- pro-Ravalomanana, aveuglés par une simple jalousie morbide de « tsalo malama loha mahasosom-po » (Personnage aux cheveux lisses faisant mal au cœur. Les vrais Malagasy comprendront vraiment…) vis-à-vis d’Andry Rajoelina, un jeune self-made-man patriote qui a réussi à faire tomber de son piédestal un personnage imbu de sa personne (expression de connotation péjorative qui s'applique aux personnes prétentieuses, qui sont remplies d'amour-propre et d'autosatisfaction) qui a démontré les limites d’un populisme d’après lui le déluge.

Les entités GTT (« Gasy tia tanindrazana » - Malgaches patriotes) et MCM pour (Mouvement des citoyens malagasy de Paris), regroupent la diaspora malgache en France, surtout, -et en Suisse (GTT « International »)- qui soutiennent Marc Ravalomanana. Ils sont les auteurs de toutes les campagnes de désinformation concernant ce qui s’est réellement passé à Madagascar, de 2009 à nos jours. « Coup d’État », « putsch » et « putschiste » sont des mots systématiquement appliqués à la révolution orange de 2009 menée par Andry Rajoelina. Dix ans après, le verdict des urnes a été impitoyable mais, vu leurs publications sur Facebook, il semble qu’ils ne baisseront les bras qu’à leur dernier souffle, laissant en héritage à leurs descendants, la haine et la vengeance. Déjà, plus jamais ça également. Mais… Passons.


Le texte qui suit a été rédigé le 3 février 2009, c’est-à-dire quatre jours avant le massacre cité plus haut. Voilà pourquoi les verbes sont au présent, pour la plupart. Il était grand temps aussi de réaffirmer mon intime conviction que l’élection d’Andry Rajoelina, en tant que président de la république, face à Marc Ravalomanana, n’a été ni le fruit d’un hasard hasardeux ni l’aboutissement de soi-disant manipulations inventées par des « confrères » mercenaires qui, pour le moment, démontrent que leur crime d’incitation à la haine, paie… Allons-y, tout de go.

Ce qui se passe à Madagascar, dépasse, comme certains voudraient trop le laisser entendre (ou résumeraient), à une guéguerre entre deux hommes riches et avides de pouvoir.

Depuis l’accession au pouvoir du Président Marc Ravalomanana, celui-ci n’a eu de cesse d’éliminer autour de lui toute forme d’opposition, en faisant incarcérer ou tuer par ses séides ceux qui le gênent. On ne compte plus les exilés politiques, ni ceux qui croupissent en prison dans l’anonymat le plus total. D’autre part, Marc Ravalomanana, dans un premier temps, n’a fait que s’approprier des biens d’État, et dans un deuxième temps s’approprier des territoires entiers en déportant massivement des populations de leurs régions ancestrales, par la force, faisant fi des droits coutumiers propres au continent africain de manière globale. Pour ce faire, et pour mieux peaufiner un plan machiavélique, à deux reprises il a gelé le cadastre sur des périodes de six mois à un an, afin de spolier un grand nombre de ses compatriotes et leur voler leurs biens dans le silence complice de toute une cour de miracle à son bottillon de pas 7 lieues, son chiffre fétiche.

Le niveau de vie des Malgaches, sous le Président Didier Ignace Ratsiraka, était, certes, faiblard, mais le peuple pouvait manger plus ou moins à sa faim, les produits de base étaient alors abordables pour la majorité au pouvoir d’achat très bas. Avec le Président Marc Ravalomanana, s’est carrément l’inverse qui s’est produit, avec la flambée des prix et l’éradication de toute forme de liberté de commerce et de concurrence loyale. En effet, il a éliminé toute la concurrence agro-alimentaire à travers les menaces ou les contrôles fiscaux qui se terminaient invariablement par la disparition de l’opérateur économique en le jetant secrètement en prison, les familles découvrant six mois, voire un an après, dans le meilleur des cas, que leur parent était incarcéré dans des conditions inhumaines. On ne compte plus le nombre de touristes qui ont été grugés puis obligés de sauter dans le premier avion trop contents d’avoir sauvé leur peau ; le nombre d’investisseurs -nationaux et même étrangers- qui étaient pourtant parties prenantes dans un semblant d’essor économique malgache, mais qui ont dû, sous les intimidations et les menaces, céder leurs commerces (établissement hôtelier ou industrie) à ce qui s’apparentait déjà à un empire dirigé un président réélu qui a oublié toutes ses promesses. C’est dans ces conditions du « ôte-toi de là que je m’y mette » (se dit pour qualifier la conduite de gens qui veulent sans droit occuper la place d’un autre, qui n’ont pour mobile qu’une ambition impatiente), que la société familiale d’Imerikasinina, « Tiko », a pu se développer. Elle est devenue une pieuvre qui a étendu son contrôle à tous les secteurs économiques en y plaçant ses « tiko boys », véritables tentacules qui ont envahi tous les rouages de l’Etat : justice, politique, économie, diplomatie, presse, armée.

Que dire des aides extérieures en tous genres systématiquement détournées au seul profit du Président Ravalomanana ? Que dire des mœurs, des détournements de mineures institutionnalisés ? Que dire des « promotions canapé » considérées comme de la bienséance civique (physique ?)… Que dire des bourses scolaires et/ou d’études qui ne s’obtenaient pas au mérite, mais revenaient au clan familial présidentiel en exclusivité ? Que dire de ce pays où le domaine de la santé publique -ayant eu, jadis un sens- qui, en devenant un terrain privilégie de tous les détournements des programmes des soins médicamentaires, a réussi à transformer les hôpitaux en mouroirs ? Pourquoi s’étonner alors, devant la faillite de ce système, de la fuite systématique des cerveaux ? Car, au milieu de ces conditions, une foule de médecins impuissants, a préféré chercher un mieux-être en désertant Madagascar pour exercer sous des cieux plus cléments.

Dans le domaine de la religion, ayant effacé la laïcité de l’Etat de la loi fondamentale, Marc Ravalomanana, face à un peuple très croyant où les églises chrétiennes ont toujours un fort ascendant spirituel, a agi en seigneur et maître sur ses sujets, se comportant en un despote pas éclairé du tout mais avide de profits. Mais ce qui a mis le feu aux poudres, c’est ce bail sur 99 ans, une vente en règle de Madagascar mais sans aucun contrôle et sans aucune concertation populaire, portant sur 1.300.000 hectares de terres arables ou non, au profit de la société sud-coréenne DAEWOO. C’est, en fait donc, la somme de tout ce qui a été décrit ci-dessus qui a amené tout un peuple à se soulever face à un tyran.

Le Président Marc Ravalomanana, comme tous ses prédécesseurs, a largement pêché, une fois réélu. Il a oublié qu’en 2002 il avait été élu par un peuple qui vivait dans une misère assez relative et qui avait espéré un changement, un mieux-être dans sa vie au quotidien. En regard de cette situation, chaque Malgache de la diaspora à travers le monde, devrait mesurer la chance qu’il a d’être libre et de manger à sa faim, et que, c’est vivant que l’on peut aider ses semblables, car mort, on ne sert plus à grand-chose. Chaque Malgache, s’il est honnête avec sa conscience, devrait surmonter sa peur des représailles et expliquer le sinistre de la réalité de tout un peuple muselé, qui a cru en Marc Ravalomanana. Mais ce dernier, au lieu de tenir parole et de conserver les espoirs qu’il avait fait naître, s’est transformé en un parjure sourd et aveugle. Il est plus que temps, que le monde connaisse et sache qu’en ce XXè siècle, il existe à Madagascar un tyran prévaricateur de la pire espèce qui mène et pousse son peuple au génocide.

Ses dérives à présent découvertes, Marc Ravalomanana doit être considéré tel qu’il est : un président de la république capable de faire venir des mercenaires étrangers pour mater une révolution populaire qui, déjà, le dépasse. Il veut tenter d’obtenir par la terreur ce qu’il n’a pas pu obtenir par la force et/ou l’imposture. Mais tôt au tard, il devra rendre des comptes au peuple malgache et à la communauté internationale pour sa forfaiture, ses forfaits et ses multiples trahisons. Alors là, une page sera enfin tournée et ce peuple malgache, en majorité composé d’une jeunesse dynamique attendant son heure, pourra enfin vivre pleinement dans le respect de l’État de droit et des droits de l’Homme.

Pour l’heure, que ceux qui soufflent le chaud et le froid à l’Union africaine -mais qui bafouent sans vergogne leurs propres constitutions, la modulant au gré des courants d’air politiques-, et qui conspuent un Andry Rajoelina plutôt soucieux d’établir une transition équitable ; ceux-là seraient mieux inspirés en faisant leur examen de conscience./. Ce texte, je le rappelle, a été rédigé le 3 février 2009

Le 7 février 2009, des membres de garde présidentielle tire sans sommation sur une foule désarmée. On connait la suite et le dénouement dix ans plus tard. Andry Rajoelina est devenu président de la république élu. Le 7 février 2019, lors de la commémoration des dix ans de cette étape douloureuse de l’Histoire de Madagascar, son crédo a été : « Plus jamais ça ! ». Honneur aux martyrs de tous les mouvements populaires à Madagascar, depuis les Menalamba avant la colonisation française de 1896, en passant par la révolte de 1947, le soulèvement estudiantin de 1972, le combat des forces vives de 1991, la lutte contre l’injustice anticonstitutionnelle et la révolution orange de 2009. Oui, plus jamais de morts à chaque fois que le peuple malgache entendra s’exprimer sur son avenir et celui de ses descendants. Oui : plus jamais de répression entrainant mort d’homme pour des idées.

Jeannot Ramambazafy – Egalement publié dans « La Gazette de la Grande île » du samedi 09 Février 2019

Mis à jour ( Dimanche, 10 Février 2019 10:59 )  
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