Du côté de la justice malagasy, on persiste à ne pas quitter l’ornière d’une certaine routine injuste -même en cas de flagrant délit !-, ou d’un zèle grassement « motivé », où le juste n’a pas sa place. Ce qui n’honore pas du tout le corps de la magistrature de la Grande île de l’océan Indien tout entier. Mais ne sommes-nous pas à Madagascar, le pays où ce qui est noir peut devenir blanc par la magie du dieu vola ?… Et qu’importe qui est le Chef d’État, jusqu’à présent.
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Mais en ce qui concerne l’assassinat de Danil Radjan, sa famille n’est pas restée les bras croisés et a fait appel à la justice française et à la «procédure miroir» quasiment inconnue à Madagascar. Qu’est-ce ? En fait, l’expression «enquête miroir» ou «procédure miroir» n’existe pas dans le Code de procédure pénale, ni dans aucun texte d’ailleurs. Seulement, elle s’est progressivement imposée pour désigner l’enquête française qui se déroule parallèlement à une procédure étrangère, lorsqu’une infraction est commise en dehors du territoire national. On pourrait tout aussi bien parler «d’enquête parallèle», mais l’expression «enquête miroir», ou «procédure miroir», est, de nos jours, profondément ancrée dans la pratique. Derrière ce terme, il y a l’idée que  la procédure française est le reflet, donc le miroir, de la procédure étrangère et qu’elle va s’y adapter.
Plus encore, voici les explications simples mais claires de Me Nicolas Goutx, avocat français inscrit au barreau de Versailles, dans les Yvelines, et membre de l’Ordre, sollicité par la famille Radjan à Madagascar pour défendre ses intérêts.
« Radjan Danil, à l’instar de son épouse, bénéficie de la nationalité française qui explique de celle-ci a pu me mandater pour saisir les autorités françaises. Quand vous êtes ressortissant français, et que vous êtes victimes de ce type de faits, directement ou indirectement, c’est le soutien que peuvent apporter les autorités françaises et, quelque part, il y a une automaticité entre l’infraction que vous avez subie à l’étranger et l’action des autorités françaises.
Alors, l’intérêt d’une procédure miroir, c’est plus qu’une substitution. Ce qu’on attend, c’est une collaboration entre les autorités françaises et malgaches, entre les services d’enquête. Et les moyens qui peuvent être utilisés par la justice française peuvent se révéler d’une efficacité redoutable et permettre l’avancée de l’enquête, notamment à travers des commissions rogatoires internationales.
Dernier intérêt, je dirais, c’est un facilitateur (Ndlr : la procédure miroir) dans la communication de l’information entre les instances de poursuite de l’instruction et les victimes. La famille (Ndlr : de Danil Radjan) est en grande souffrance ; son épouse est totalement anéantie ; il a un frère (Ndlr : Moustapha Ameralli Alibay Radjan sur lequel deux individus à moto ont tiré à 3 reprises du côté d’Ambatobe, le 13 novembre 2017), avec qui j’ai pu m’entretenir, qui a été, lui-même, victime d’une infraction très grave il y a peu de temps. Voilà  : il y a un mélange entre souffrance, entre colère et l’attente.
L’attente de comprendre un mobile qui, pour l’instant, nous est inconnu, mais nous espérons que la collaboration entre les autorités françaises et malgaches, permettra de faire la lueur sur toute cette affaire. Car comprendre le mobile, c’est ne pas accepter mais pouvoir, peut-être, envisager de faire le deuil »./.
Pour rappel, le corps inanimé de Danil Radjan a été trouvé dans le parking souterrain du centre commercial « La City » à Ankorondrano Ivandry, le 19 septembre 2020. Une semaine après la découverte du corps sans vie de Danil Radjan, Lionel Lelièvre, ancien légionnaire du 2ème REP (Régiment étranger de parachutistes) français, et fondateur de la société COPS (Centre Opérationnel de Protection et de Sécurité) et trois de ses agents ont été appréhendés et mis en garde à vue, suite à leur identification à partir de séquence de caméras de surveillance.
A l’issue de leur déferrement au parquet à Anosy, le 28 septembre 2020, le tribunal a pris une décision qui ne doit exister qu’à Madagascar : les trois agents de sécurité de la société ont écopé d’un envoi immédiat, bien qu’à titre provisoire, à la maison de force de Tsiafahy tandis que leur patron fondateur, Lionel Lelièvre, l’ancien légionnaire français, a été mis sous contrôle judiciaire. Pourquoi ? Nous le saurons certainement bientôt avec l’entrée en scène de la justice française qui ne badine pas, surtout lorsqu’il s’agit d’un crime de sang. Cette démarche ne va pas redorer le blason blafard de la justice malagasy.
Jeannot Ramambazafy - Également publié dans "La Gazette de la Grande île" du samedi 10 octobre 2020
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