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Home Accueil A la une New York, 21.09.2022. Discours intégral du Président Andry Rajoelina lors de la 77è Assemblée générale des Nations Unies

New York, 21.09.2022. Discours intégral du Président Andry Rajoelina lors de la 77è Assemblée générale des Nations Unies

Monsieur le Président de l’Assemblée Générale,

Monsieur le Secrétaire Général des Nations Unies,

Excellences Mesdames et Messieurs les Chefs d’État et de Gouvernement, Mesdames et Messieurs les Délégués,

Tompokolahy sy Tompokovavy,

Mesdames et Messieurs, Honorable assistance.

Permettez-moi d’abord de m’adresser à Monsieur Kőrösi, Directeur de la durabilité environnementale auprès de la Présidente de la Hongrie : votre élection à la Présidence de cette 77ème Assemblée Générale des Nations Unies est un message clair sur la feuille de route tracée par ce rendez-vous annuel des Nations. Recevez mes sincères félicitations.

Monsieur le Secrétaire Général,

Je vous adresse ma profonde reconnaissance pour vos engagements continus et votre dévouement dans le Leadership dont vous faites preuve à diriger cette Organisation que sont Les Nations Unies.

Au nom de tout le peuple Malagasy, je profite également de cette auguste tribune pour réitérer nos condoléances les plus sincères au Peuple britannique. La Reine Élisabeth II a inspiré de nombreuses générations dans son pays et dans le monde entier. J’adresse également nos meilleures félicitations et nos vœux d’un excellent règne empli de bonne santé et de bénédictions, à Sa Majesté le Roi Charles III.

Excellences Mesdames et Messieurs,

Le rendez-vous annuel des Nations Unies à l’Assemblée Générale est toujours l’occasion de porter haut nos aspirations, ce qui nous unit tous : la Paix universelle.

Maintenant que nous avons appris à cohabiter avec la Covid19, face à laquelle nous avons longuement combattu au cours des deux dernières années, nous faisons malgré tout, face aux conséquences de cette crise.

Cela nous a prouvé que c’est dans les moments difficiles que nous réalisons l’importance de la Solidarité entre les Nations. Le thème de cette session : « Des solutions transformatrices pour des défis interdépendants », prend ainsi tout son sens ; nous donne à nouveau espoir ; nous rassure et nous ouvre sur les perspectives pour avancer ensemble sur la voie du Développement.


Lorsque nous avons dû affronter la crise sanitaire, nous avons choisi de faire confiance à nos scientifiques et aux richesses naturelles de notre terre. La création de l’usine pharmaceutique « Pharmalagasy » en pleine crise sanitaire, nous a démontré que nous pouvons transformer les difficultés en opportunités, afin d’exploiter notre biodiversité et ainsi protéger la population malagasy.

Alors que l’on présageait l’hécatombe en Afrique, le taux d’infection et de mortalité à Madagascar figure parmi les plus faibles au monde. Mon pays est classé comme zone verte, parmi ceux à faible risque de contamination. Actuellement, l’entrée à Madagascar ne nécessite ni test ni pass sanitaire.

Nous avons déjoué toutes les statistiques et sommes ressortis plus forts mais surtout plus engagés encore vers la route de l’Émergence de notre pays.

Mesdames et Messieurs,

Le monde se relève à peine de la pandémie, que de nouvelles crises ont fait surface. Aucun pays n’a été épargné par les conséquences de la Covid19, et le conflit en Ukraine a davantage entrainé un déséquilibre creusant les inégalités. Cela vient encore compliquer grandement nos efforts de résilience et de relance post-covid. Comme tous les pays du monde, nous subissons pleinement les impacts inflationnistes de cette crise.

Nous sommes convaincus que toute guerre se termine autour d’une table. Le dialogue est la seule voie pour instaurer la paix. C’est ainsi que Madagascar réitère son appel au dialogue pour résoudre le conflit, car les conséquences sont planétaires, elles s’alourdissent de jour en jour et les pays en développement, comme le nôtre, en sont les principales victimes.

Le rôle crucial des Nations Unies doit favoriser le multilatéralisme afin de trouver des solutions équitables, tenant compte des forces et des vulnérabilités de chaque pays et de sa population. Comment peut-on accepter qu’en cette période de crise, certains pays avec plus de 100.000 dollars de PIB par habitant, et d’autres à moins de 600 dollars, achètent les barils du pétrole au même platz, au même prix ?

Notre organisation peut prendre des mesures pour accompagner les pays à faible revenu, afin qu’ils puissent bénéficier et s’approvisionner en pétrole à des prix équitables, parce que la situation mondiale actuelle est source de bouleversement majeur dans de nombreux pays. Certains États se retrouvent déstabilisés, la vie sociale se désorganise et les économies se fragilisent. En effet, certains ont dû appliquer des augmentations de 50% du prix du carburant, entrainant, dans certains pays des émeutes, et des déséquilibres socio-économiques considérables.

La reconstruction est l’affaire de tous. Notre Solidarité est la seule voie pour guérir nos sociétés, rétablir nos économies, soutenir la croissance et surtout instaurer la Paix.

Mesdames et Messieurs, Chers leaders,

A l’heure actuelle, tous les pays ont dû revoir leur stratégie de développement et cela a renforcé la nécessité d’accélérer l’industrialisation et l’autonomisation de chaque pays. Nous restons convaincus que nous devons produire et transformer localement tout ce dont la population a besoin.

Car il y a des armes plus puissantes que les bombes, les chars et les missiles. Ce sont nos terres, nos matières premières, nos ressources naturelles et notre peuple. L'industrialisation locale, l'innovation agricole et le Leadership des dirigeants sont nos munitions pour consolider notre force et notre bouclier afin de protéger notre population.

A Madagascar notre stratégie est précise et détaillée pour rattraper le retard de développement. Nous avons élaboré le Plan Émergence Madagascar, dont la mise en œuvre a été lancée depuis le début de mon mandat présidentiel en 2019. Notre vision est claire et traduite par une volonté politique que nous démontrons à travers chacune de nos actions.

Une approche secteur et projets a été priorisée afin de hisser l’économie nationale au rang des pays nouvellement émergents. Nous avons lancé un programme de réformes ambitieux pour moderniser l’administration, développer le capital humain et permettre une croissance économique forte, inclusive et durable dont l’énergie est le pilier du Développement. Madagascar est un pays béni, car nous avons des ressources en eau pour des barrages hydrauliques, un taux d’ensoleillement très élevé pour des centrales solaires et la puissance du vent pour des parcs éoliens.

A l’heure actuelle, où de nombreux pays font face à des problèmes énergétiques, nous nous devons d’accélérer la production d’énergie renouvelable pour atteindre l’autonomie, d’ici cinq ans. Nous projetons de doubler, voire tripler notre capacité de production.

Mes chers homologues et frères,

Nous sommes en 2022, et il est malheureux de constater que l’Afrique est encore le continent où la majorité des familles vivent dans le noir et dans l’obscurité. Plus de 600 millions d’Africains, dont 85% des ménages malagasy, utilisent encore des bougies et du pétrole lampant pour éclairer leurs foyers. Raison pour laquelle nous lançons la plus grande opération d’équiper la majorité des foyers malagasy de kits solaires d’ici la fin de l’année prochaine, dont une partie sera subventionnée par l’État. Une fois cet objectif atteint, Madagascar ambitionne d’être parmi les premiers pays sur le continent à avoir apporté la lumière à la totalité de sa population.


Le changement climatique est aussi l’un des plus grands défis que notre époque doit affronter. Il est important et urgent de travailler et de se mobiliser pour protéger notre planète. Du haut de cette tribune, je tire la sonnette d’alarme. Des engagements ont été pris lors de la COP 21, et réaffirmés lors de la COP 26 concernant la création du « Fonds vert pour le climat » à hauteur de 100 milliards de dollars par an. Dans ce sens, Madagascar a été le 5e pays africain à avoir finalisé son Plan National d’Adaptation. Mon pays devrait ainsi faire partie des bénéficiaires de ce fonds vert. Cependant, l’accès au financement tourne au ralenti et actuellement, aucun engagement n’a été respecté.

Il est injuste que les pays les moins pollueurs paient le plus lourd tribut des impacts du changement climatique.

Madagascar se trouve parmi les pays insulaires, et donc vulnérables aux aléas climatiques, rien qu’au début de l’année 2022, cinq cyclones ont frappé la Grande île en l’espace de deux mois seulement. 178.000 Ha de terres agricoles ont été inondées et ravagées.

Notre Ile est le premier pays à subir une famine d’origine climatique, les sources d’eau se tarissent dans le Sud et la population de cette région est de plus en plus vulnérable.

Les conséquences du changement climatique s’aggravent et la situation mondiale nous interpelle. Combien de réunions de haut niveau, de sommets et de conférences internationales avons-nous déjà eus, combien de déclarations et engagements avons-nous déjà prononcées ? Transformons maintenant les discours en actions concrètes.


Aujourd'hui, je porte les cris et la voix du continent africain, en général, et de Madagascar en particulier. La jeunesse africaine, le continent tout entier attendent la concrétisation des accords de la part des pays émetteurs. Tenir ces engagements, c’est protéger notre Planète. Nos populations l’exigent, et les générations futures nous en demanderont des comptes.

Les problématiques de la protection de l’environnement me tiennent particulièrement à cœur. Nous savons tous que la forêt est le poumon de la terre. Et pourtant, l’utilisation du charbon de bois et du bois de chauffe reste une pratique courante sur l’ensemble du continent africain, et c’est le cas des 92% de la population de mon pays. Une famille utilisant le charbon ou le bois pour la cuisson détruit environ 1 ha de forêt par an. Ce qui est dévastateur. Nous devons changer la pratique et la mentalité. C’est pourquoi, l’État malagasy va équiper 250.000 familles en réchauds à bioéthanol, afin de préserver 250.000 ha de nos surfaces forestières chaque année.

Mesdames et Messieurs,

Nous avons lancé les grands travaux pour transformer le pays car tout est à faire et à refaire, tout est urgent, et tout est prioritaire. Cela fait presque quatre ans que nous n’avons cessé de construire et réhabiliter des routes, bâtir des écoles, des centres de santé, des hôpitaux, des barrages agricoles, des tribunaux, des prisons aux normes, des infrastructures sportives et culturelles et bien d’autres.

Madagascar évolue continuellement, malgré les crises en cascade à l’échelle mondiale. Le pays est tellement vaste, bien que de nombreux efforts aient été déployés pour le désenclaver. Toutefois, le chemin est encore long et sinueux, mais nous avons la foi et nous continuons d’avancer avec détermination. Le Plan Émergence Madagascar trace littéralement les voies vers l’avenir.


Du Nord au Sud et d’Est en Ouest, tout Madagascar est en chantier. Pas plus tard que la semaine dernière, nous avons inauguré la Route Nationale 5A dans le Nord de l’Ile, qui, jusque-là et pendant des décennies, était une route en terre battue, que l’on parcourait en une semaine en période de pluie. Actuellement, deux heures suffisent pour le trajet, permettant immédiatement la révision à la baisse des prix du transport des biens et personnes, améliorant considérablement la vie de la population locale et contribuant enfin au développement socio-économique des régions du Nord.

Par ailleurs dans le Sud du pays, nous commençons les travaux de la Route Nationale 13, et bientôt ceux de la Route Nationale 10, tout comme ceux de la Route Nationale 44 dans l’Est qui se poursuivent, désenclavant le principal grenier à riz de Madagascar. Dans le Nord-Ouest, la Route Nationale 31, également en piste, sera entièrement réhabilitée, permettant d’accéder à notre deuxième grenier rizicole. La première autoroute du pays, qui reliera la Capitale au Grand port de l’Est, débutera dans quelques semaines. Un trajet qui nécessite actuellement plus de 10 heures mais qui sera fait en deux heures et demie seulement une fois les travaux terminés.

La dividende démographique est aujourd’hui une variable qui doit entrer dans l’équation. Nous devons changer la structure de la population. La croissance démographique actuelle n’est pas proportionnelle à la croissance économique. Dans certaines régions, des jeunes filles de moins de 18 ans sont déjà mères de famille et se retrouvent, en moyenne, avec cinq à huit enfants à leur charge. Par conséquent, elles ont plus de difficultés à les nourrir, les élever, les soigner et les éduquer correctement.

Le programme de Planning familial déjà initié est ainsi primordial dans notre stratégie d’action pour maîtriser les naissances et transformer la population actuelle dépendante en une population active et économiquement productive. La démographie deviendra pour Madagascar un atout et non plus un frein au Développement.

Dans le volet Éducation, nous avons fait un pas de géant. L’État Malagasy a construit plus d’un millier de salles de classes et a énormément investi dans les outils et matériels pédagogiques. Nous avons mis en place des cantines scolaires, nous avons conçu des livres et manuels, distribué des tablettes numériques afin d’améliorer considérablement la qualité de l’éducation de nos enfants et de nos jeunes. Le taux d’accès à l’éducation de base a augmenté de 146% et le taux d’abandon scolaire a été réduit de manière palpable.

Nous avons fait de l’Éducation une priorité nationale. Et nous renouvelons notre engagement à transformer et à redynamiser la vie scolaire et universitaire.


L’année dernière, j’ai également eu l’opportunité d’évoquer le souhait de mon pays de voir enfin appliquées les résolutions prises par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1979 et en 1980 sur la restitution et la gestion des Iles Éparses ou Nosy Malagasy dans l’Océan Indien à Madagascar. Nous nous réjouissons de la tenue très prochaine de la deuxième rencontre de la Commission Mixte Franco- Malagasy sur le sujet et, forts de ces deux résolutions, qui confirment la légitimité de notre revendication, nous espérons pouvoir compter sur le soutien des Nations Unies, pour parvenir enfin à une solution concertée, juste et apaisée.

Excellences,

Mesdames et Messieurs,

Pendant la pandémie, les malades avaient besoin d’oxygène pour survivre. Actuellement, de nombreux pays sont asphyxiés par les séquelles des crises successives. Ces pays ont ainsi besoin de soutien, d’aide et d’accompagnement, qui leur serviront de bouffées d’oxygène pour faire face aux défis de la relance socio-économique et atteindre les objectifs du développement durable.

Il est nécessaire d’accélérer la mise en place de nouveaux mécanismes de financement tels que le FFDR ou Fonds Fiduciaire pour la Résilience et la Durabilité, et en activer le décaissement. Je saisis cette occasion pour remercier Le Fonds Monétaires International, la Banque Mondiale et les autres pays amis qui ont toujours été aux côtés de Madagascar dans les moments difficiles.


Chers Homologues, mes Frères Leaders Africains,

L’Afrique de demain doit être autonome, indépendante et prospère. Nous avons le devoir de changer l’Histoire du Continent et d’écrire une nouvelle page pour chacun de nos pays.

Notre organisation a besoin de renforcer sa solidarité, pour apporter des solutions communes à nos problèmes communs.

Hotahian’Andriamanitra anie ny firenentsika tsirairay avy,

Que Dieu bénisse chacune de nos Nations,

Masina ny Tanindrazana, la Patrie est sacrée !

Je vous remercie de votre attention.

ONU, New York, 21 Septembre 2022

Andry RAJOELINA,

Président de la République de Madagascar

Recueillis par Jeannot RAMAMBAZAFY

Mis à jour ( Mercredi, 21 Septembre 2022 23:06 )  
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