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Madagascar : l’art de compliquer les choses hérité du colonialisme

 

On doit se frotter quelque part, dans des salons à l’abri de toutes sortes d’attaques. En effet, c’est le comportement de tout individu qui, n’ayant plus rien à perdre, lâche ses pions pour quelques euros de plus.  Ce fait émane de Marc Ravalomanana qui, bien à l’abri en Afrique du Sud, attend impatiemment que tous les Malgaches s’entretuent pour venir en « sauveur » avec des forces armées étrangères. Africaines plus exactement. Ce rêve risque de tourner en cauchemar pour lui parce que les militaires malgaches ont plus d’un tour dans leur sac. Surtout après les déclarations lumineuses de Manandafy à Maputo. L’envahissement de Madagascar ? Il n’y avait qu’un Malgache pour penser à çà ! Ah si Bob Denard était en vie…

 

Rira bien qui rira le dernier...

Du côté des trois mouvances Ratsiraka-Ravalomanana-Zafy, la mauvaise foi prime sur toute considération du peuple qui les a vomi. Déjà une revanche…  Ignorant superbement la Charte de la Transition qu’ils ont signé, et l’invitation du président de la HAT de se réunir au Centre de conférences internationales d’Ivato -ce 3 septembre-, les chefs de file des trois mouvances, par la voix du Professeur Zafy Albert (et en l’absence évidente de Didier Ratsiraka et Marc Ravalomanana), n’ont rien trouvé mieux que de proposer un directoire militaire pour les trois postes-clés de la transition : Présidence, vice-présidence et Primature. C’était à l’hôtel Carlton. Décidément l’art de compliquer les choses atteint son summum dans la Grande île de l’océan Indien. Effectivement, le Professeur Zafy prend vraiment le peuple malgache pour des canards sauvages. Entre 1991 et 2009, tout de même, 18 ans ont passé. A croire que le Prof vit déjà sur une autre planète. Il se sent soudainement réinvesti de ce qu’il a lui-même perdu par sa mauvaise gestion du pays. En fait, les trois mouvances ont choisi là une solution à l’emporte-pièce, histoire de parler pour dire quelque chose, même quelque chose d’insensé. Le but évident : stopper les idées par trop innovantes de ce jeune homme qui, à lui seul, a osé défier et a réussi à faire tomber un homme de la trempe de Ravalomanana. Un Ravalomanana, merina honni par Zafy, et qui en a fait voir des vertes et des pas mûres à Ratsiraka. Mais tant pis, la haine est la plus forte. Que le pays coule mais tous ces trois anciens présidents vomis par le peuple, en l’espace de trente ans, ont eu la « chance » de remonter en selle, grâce au Groupe international de contact, digne héritier de la politique coloniale qui était -est demeure encore donc- : diviser pour régner.

 

Ils n’ont même pas calculé leur coup, sachant d’avance les réactions de ces anciens ennemis jurés face à ce jeune impertinent qui bouscule l’ordre colonial financier établi. Mais pour qui se prend Zafy Albert qui ne sera jamais accueilli avec des fleurs s’il va à Ambilobe, sa région natale ? Et c’est bien là le drame de cet héritage colonial. Il y a déjà eu l’histoire du Padesm (Parti des déshérités de Madagascar) monté de toutes pièces pour contrer les revendications du Mdrm (Mouvement démocratique pour la rénovation de Madagascar). L’existence de ces deux partis a entraîné l’antagonisme haut plateaux/côtiers. Mais dans le Mdrm il y avait des « côtiers », comme dans le Padesm, il y avait des « hauts plateaux ». Toutes les racines du blocage actuel se situent dans un esprit de revanche pure et simple. Personne ne peut prouver que les parents de Marc Ravalomanana ne faisaient pas partie du Padesm. Le peuple ? Il n’a jamais été considéré dans les trois républiques qui se sont succédé. Et l’esprit de mauvaise foi et d’égoïsme de leurs dirigeants successifs transparaît actuellement. Et cet esprit a le visage de vieillards dont l’avenir est derrière eux. Ceci explique aussi cela : 82 ans (Zafy), 73 ans (Ratsiraka), 60 ans en décembre (Ravalomanana). Retour d’âge ou gâtisme, ils sont désormais imprévisibles.

 

Pourquoi dramatiser, dès lors ? Que celui qui croit que la liberté est facile à acquérir ou se donne comme un diplôme honoris causa, lève le doigt. Si Madagascar a besoin d’une guerre, allons-y ! Mais sachez déjà qui sont les vrais responsables et ne regrettez jamais de votre vie. Jamais, au grand jamais, sauf dans les années 1890 et en 1947, les Malgaches n’avaient d’ennemi commun (« fahavalo iombonana »). Depuis le retour de l’indépendance, c’était des guéguerres comme le font les Bretons ou les Corses en France. A Madagascar donc, certains souhaitent revivre ce qu’ont vécu les Etats-Unis : guerres de sécession, d’indépendance… Contre qui ? Interrogé sur cette suggestion de directoire militaire farfelue mais dangereuse de la part de ces trois présidents périmés, les militaires malgaches n’ont pas dévoilé leurs batteries (mais ils se réunissent dans le plus grand secret) et les membres du fameux GIC (Groupe International de Contact) ne se sont pas sentis concernés. Le contraire aurait été miraculeux. On sème le bordel et on s’éloigne à petits pas. Voilà le résultat du colonialisme : donner de l’importance à des dirigeants qui n’ont rien apporté au peuple de 1975 à 2009. Même pas foutu de fabriquer des sardines en boîte exportables alors que Madagascar est entouré par la mer.

 

Vraiment, il y a de quoi aller en… guerre. De son côté, Andry Rajoelina, lui, suit implacablement les us et coutumes hérités par les ancêtres malgaches : le « teny ierana » ou consultation populaire. Ainsi, en cette après-midi du 3 septembre 2009, plus de 750 personnes, issues de toutes les forces vives du pays englobant les partis politiques, les associations et syndicats, les représentants des Régions,  les femmes, les jeunes et les experts dans tout Madagascar, ont été présentes au Palais d’Iavoloha. Voilà les représentants du peuple et non Zafy Albert ne représentant que sa propre déchéance. Cette rencontre avec Andry Rajoelina a duré plus de trois heures. Le crédo était le même : « Andry Rajoelina à la Présidence et Monja Roindefo à la Primature ».

 

Par ailleurs, les intervenants n’ont pas manqué de fustiger l’ingérence de la Communauté Internationale dans les affaires malgaches. Quant aux membres du GIC, les politiciens malgaches ont constaté que ces derniers ne respectent aucunement la souveraineté nationale et veulent adopter à Madagascar le « néocolonialisme » (tiens ! Mais il est là depuis 1960 !). Pour certains, la Communauté Internationale met la pression sur Andry Rajoelina qui, jusque là, était très tolérant. D’autres ont pensé que la participation du GIC dans les affaires malgacho-malgaches ne fera qu’empirer l’état actuel des choses. En tout cas, tous ont été unanimes à reconnaître que c’est le moment ou jamais de prendre une décision ferme pour sortir de la dépendance économique dans laquelle patauge le pays depuis des décennies. En passant, à qui a profité tous les effacements de dettes et les IPPTE médiatisés à outrance durant le premier mandat de Ravalomanana ? Les Malgaches sont toujours endettés que je sache.

 

 Lors de ce « Teny ierana », les représentants des jeunes, pour leur part, ont fondé tous leurs espoirs sur Andry Rajoelina : « C’est le seul homme d’Etat pouvant apporter un réel changement à Madagascar. Son discours d’hier, à Ambohitsorohitra, témoigne de sa volonté de sortir Madagascar de la crise qui prévaut actuellement et confirme le patriotisme dont il a toujours fait preuve. Vous êtes un  modèle de tous les jeunes Malagasy.  Il ne s’agit surtout pas d’un conflit de génération, mais nous  sommes convaincus que vous pourrez apporter un changement dans ce pays. L’heure est venue pour les jeunes de prendre leurs responsabilités ». Puis, les discussions ont porté sur les sommets de Maputo I et II : « Ils ont éveillé le patriotisme des Malagasy », selon des chefs de parti politique. Tous ont déclaré également que « les anciens dirigeants ne méritent pas d’être intégrés dans une institution ou dans un gouvernement. Ils ont suffisamment détruit le pays et personne ne peut garantir que, dans l’avenir, ils pourraient contribuer au développement de ce pays ». 

A l’issue de cette rencontre hautement respectueuse de la culture malagasy trop longtemps oubliée par mépris, Manassé Esoavelomandroso - actuel Président du Leader Fanilo fondé par feu Herizo Razafimahaleo) -, a remis à Andry Rajoelina la synthèse de toutes les propositions et suggestions émanant de ces « Forces du changement ».  Lorsque ce fut le tour du Président de la Haute Autorité de la Transition de prendre la parole, il a rappelé que, durant les deux séries de négociations à Maputo, les décisions ont toujours été prises d’une manière consensuelle avec les membres de sa délégation. C’est cela le «  teny ierana » hérité des ancêtres. Pour être plus explicite, Andry Rajoelina ne décide jamais seul quand il s’agit de l’avenir du pays. Pour lui, quelque décision que ce soit à ce sujet nécessite une consultation préalable. Et c’est dans cette perspective qu’il a procédé à ces diverses consultations, afin de réunir et de collecter des propositions de sortie de crise émanant directement de la population et des points de vue divers issus de toutes les forces vives de la nation.

 

Lors de cette seconde consultation populaire à un niveau plus élevé, Andry Rajoelina a lancé un appel à tous les acteurs politiques, à toutes les forces vives, à tous les intellectuels, à tous les experts, à tous les jeunes, à tout le peuple malgache sans exception, mais surtout aux trois autres mouvances, ressentant une volonté réelle de contribuer au redressement du pays et au dénouement de la crise : « Sachez que la porte d’Ambohitsorohitra reste grande ouverte à tous ceux qui ont l’intention de me donner la main, dans le plus grand respect de la souveraineté de notre pays et dans la mise en place d’un Madagascar  indépendant sur le plan économique, politique et social ». Andry Rajoelina attend la date butoir, le 4 septembre 2009, pour révéler sa décision. En tout cas, alea jacta est : plus rien ne sera comme avant, quoi qu’il puisse arriver. Mais je puis vous assurer qu’il y aura une très grande surprise. Ce sera ou le début de la fin ou le début du commencement. De qui, de quoi, pour qui, pour quoi ? Rendez-vous ici dans 24 heures  chrono !

 

Jeannot RAMAMBAZAFY

Antananarivo, le 3 septembre 2009

Mis à jour ( Vendredi, 04 Septembre 2009 04:44 )  
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