Surtout n’allez pas croire les rapports officiels pour argent comptant. D’abord, ils émanent d’un pouvoir qui œuvre dans le forcing pour tenter de développer Madagascar tout seul. Et bien, le parti Tim est en train de commettre les pires erreurs que ses prédécesseurs Psd et Arema réunis. Celles pour lesquelles le sang de nombre de martyrs a coulé en 1972, 1991 et 2002. Les signes avant-coureurs d’une révolution sont bel et bien là . Quand et de quelle manière sera-t-elle consommée ? Patience mon ami….
Décrets, parachutages puis limogeages
Personnellement, je suis entièrement effaré avant d’être bluffé par les compte-rendus dominicaux du président Ravalomanana sur les ondes de la Tvm, Rnm, médias officiels et Mbs, the Master’ Voice qui peut être capté dans toute l’île sans s’être plié aux exigences de la loi en vigueur. Tout ce qu’il débite avec le ton du bon pasteur au-dessus de tout soupçon (et je lui donnerai même le bon Dieu sans confession) est contredit dans la semaine qui suit par les réalités vécues par le peuple. En passant, il faut noter que la période « d’essai » des émissions de la Mbs (télévision et radio) s’éternise car le groupe appartient à Marc Ravalomanana qui, lui, réélu pour un second mandat, n’a déjà plus pris la peine de faire une déclaration de ses avoirs et biens (centuplés depuis) comme stipulé par la loi, toujours, au travers du Bureau indépendant anti-corruption ou Bianco. Alors que ce dernier passe de la publicité sur les médias officiels pour que les personnalités élus ou nommés à de hautes fonctions se plient à cette déclaration. Cela indique que dans mon pays pauvre d’esprit, c’est vraiment le président qui fait la loi et la défait à coups de décrets, de parachutages puis de limogeages. Le cas du Pds (Président de la Délégation Spéciale) de Nosy Be est lumineux, bien qu'il ait failli à sa mission, lors qu'il n'était là que depuis même pas trois mois... Jusqu’à présent, le contentieux des élections municipale et communale réunies de décembre 2007 n’a pas encore été réglé par le tribunal administratif que, déjà , l’on s’achemine vers des élections sénatoriales pour les grands électeurs que sont les maires et les membres des conseils régionaux. Et tant pis si l’élection des maires de Nosy Be, Sainte Marie et Fort-Dauphin soit repoussée aux calendes grecques : la loi c’est le Tim un point c’est tout.
Adieu «Fahamasinana sy Fahamarinana »
Dans cette situation dictatoriale qui ne dit pas son nom, j’ai l’impression de vivre les rudes temps de la révolution socialiste mais pratiquée sous d’autres vocables. Le « Mamokara, mamokara ihany » (produisez, produisez encore) a été remplacé par le « Miasa, mafy, miasa tsara » (travaillez dur, travaillez bien). Quant au « Boky mena » (livre rouge), l’actuel Madagascar Action Plan ou Map est son jumeau. C’est-à -dire un très beau chef-d’œuvre rédactionnel, de la théorie pour aller directement au 7eme ciel mais utopiquement réalisable faute de temps et surtout d’argent. D’ici quelques temps, des gens vont encore être emprisonnés car taxés ennemis du développement comme on était ennemis de la révolution socialiste. Mais qui diable n’aspire pas à ce fameux développement ? Ne vous fiez pas aux apparences : la majorité des Malgaches souffrent énormément. D’abord dans leur portefeuille mais surtout dans leur orgueil d’avoir été trompés une fois de plus par un autre messie qui, dès son second mandat, a annoncé une couleur loin de la sacralité et de la droiture («Fahamasinana sy Fahamarinana »), vocables qu’il n’utilise plus d’ailleurs. En se permettant désormais de répondre dédaigneusement à toute question logique et sensée, il va finir par craquer et oser dire que çà nous apprendra à avoir voté pour lui. Actuellement, le président pour qui j’ai voté deux fois déçoit de plus en plus, au fil du temps. Tant pis pour moi. Personnellement, je n’ai plus grand-chose à gagner ou à perdre qu’il soit là ou non, mais les générations présentes et futures vont au-devant des pires des sacrifices s’ils ne réagissent pas. Au nom du Map et du développement aussi rapide qu'une tortue dont le lièvre a été levé...
Capitalisme d’Etat
Réagir dans le respect de la démocratie, évidemment. Va-t-on finir par me mettre aux arrêts pour incitation à la révolte ? Tout est possible ici-bas, à Madagascar plus qu’ailleurs de nos jours, mais il faut avoir le courage de ses opinions, pas vrai ? Mes jeunes confrères des journaux « Ny Vaovaontsika » et « Le Quotidien », du groupe Tikoland, devraient vraiment se pencher sur l’histoire récente de leur pays car ils ont tendance à confondre journalisme et propagande. Il faudrait être aveugle, sourd et muet pour ne pas s’apercevoir que la révolte gronde au sein d’une population totalement désemparée, qui survit plus que ne vit mais qui ne veut pas revivre les affres de la situation de 2002. En sept ans, leur espoir d’une vie meilleure s’est estompé face à un authentique capitalisme d’Etat qui enrichit les riches et appauvrit les pauvres. Les diplomates -parce qu’ils sont diplomates justement- ne vous apprendront rien de ce qu’ils ressentent autour d’eux. Du moins pas officiellement. Mais dans les salons privés, on se pose des tas de questions. Cependant, le pays regorge de ressources minières insoupçonnables valorisées par des géants pas tellement humanistes, en exploitant la pauvreté d’esprit des dirigeants passés et présents. Et tant pis pour le peuple imbécilisé à dessein. Car les retombées financières de l'ilménite, cobalt et compagnie n'auront jamais d'impacts directs conséquents sur la population malgache. Tout sera exporté brut...alement.
Lera !
Voilà la racine des maux de mon pays. De quelle souveraineté nationale font-ils allusion lorsqu’au moindre reniflement d’odeur d’euros ou de dollars, ils laissent piller officiellement le pays par des multinationales dont les intérêts n’ont jamais été philanthropiques ? Les Malgaches ne seront jamais indépendants économiquement tant que leurs dirigeants se complairont à vivre et se conduire comme des milliardaires, loin de tous soucis sociaux. Malgré le baril de pétrole à plus de 100 dollars, les 4X4 flambant neuves continuent de foisonner à Antananarivo. Cela épate littéralement l’Européen qui débarque pour la première fois ici. Actuellement, les dirigeants font table rase de toutes les structures passées qui, pourtant, avaient atténué les souffrances, pour mettre en place des officines gouvernementales qui ne dureront que le temps qu’ils seront là , et qui sont rattachées à la présidence. A mon sens, développement signifie amélioration, extension de ce qui existe déjà . Et bien non, les dirigeants malgaches passés et présents ont la sale manie de détruire tout ce que leur prédécesseurs ont mis en place et qui avaient fait du bien au peuple, pourtant. Cette façon d’agir relève vraiment de la psychanalyse. En sont-ils conscients, au moins ? Je ne vais pas entrer dans des détails mais le temps n’est plus aux faux espoirs, il y a de la révolution dans l’air. Il suffirait d’un rien pour mettre le feu aux poudres. L’annulation subite des concerts de Rossy, artiste de renom résidant en France, juste après une réunion au sommet et à huis clos des hauts responsables des forces armées, est un signe flagrant. Ce chanteur auteur compositeur, proche de l’ancien pouvoir, qui a contribué au retour de l’Amiral au pouvoir en 2007 avec sa chanson « Lera », est capable de remplir des stades à Madagascar. Du coup, à l’approche de ces sénatoriales qui n’intéressent vraiment plus personne, sauf les nombrilistes inféodés, les dirigeants ont une peur bleue de ne pouvoir maitriser toute une foule qui, après spectacle, pourrait déclencher la révolution. Bref, le pouvoir Tim est un géant au pied d’argile. Ce n’est pas la peine d’invoquer la tenue de cette élection-nomination. Sinon, pourquoi ne pas avoir annulé la venue de Yannick Noah qui débarque dans quelques jours ?
Mégalomanie
Qu’on se le dise : le peuple malgache, en ce moment, attend les actuels dirigeants au tournant. Mais ce peuple encore bafoué fait de l’attentisme prudent. Qui sera le prochain messie après Didier Ratsiraka (1975), Albert Zafy (1993) et Marc Ravalomanana 2002) ? Parce que ce dernier, actuel président mal-aimé par ses propres lubies, ne pourra tout de même pas emprisonner tout le monde. C'est-à -dire la large majorité actuelle des Malgaches qui ne croit plus en saint Marc... L’anti-démocratie a ses limites tout de même ! Alors on temporise, on rêve même à penser que peut-être qu’il va changer de ton et de stratégie. Je persiste et signe en disant que le président Marc Ravalomanana a tellement pris goût au pouvoir que de très mauvaises surprises attendent encore le peuple, à commencer par des discours de plus en plus démagogiques. En tout cas, vouloir réunir à tout prix le club des dictateurs de l’Afrique à Antananarivo, en 2009, sera la cerise sur le gâteau de ses turpitudes. Le peuple malgache n’est pas dupe. En tout cas, rien ne va plus au sein même du parti au pouvoir. On parle même de remaniement gouvernemental après les sénatoriales. Mais après avoir déshabillé Pierre pour habiller Paul, le prix du riz et des PPN sera-t-il maitrisé en cette période de soudure qui s’annonce extrêmement difficile ? Voire. Quoi qu’il en soit, gardez cet article dans le tiroir des archives de l’histoire de Madagascar. La révolution tout court éclatera bien avant la révolution… verte espérée dans le Map qui n’arrivera que difficilement à mobiliser les gens, de toutes les manières. Ce n’est ni ma faute, ni celle de mon voisin qui n’a toujours ni eau courante ni électricité.
C’est la faute à Monsieur Trop-de-Pouvoir-Qui-Corrompt. Et moi, j’ai perdu mes illusions face à un pouvoir qui accumule tous les ingrédients de la mégalomanie. Madagascar de nos jours, c’est triste comme Venise au temps des amours mortes. Venez dans mon quartier si vous voulez vraiment vivre « chez l’habitant »… Que demandait le peuple -moi compris- en 2002, à ce laitier -devenu riche avec les sous de la Banque mondiale grâce à l'aval du président Didier Ratsiraka- qui l'avait porté aux nues ? Plus de bien-être social et plus de justice. Hélas, ils ont « plus pire » comme dirait l’ami Raymond Devos. On ne bafoue pas impunément et indéfiniment un peuple souverain izay mitoetra raha toa ka mandalo fotsiny ihany ny mpitondra (Faites-vous traduire). Certains auront encore le culot de plaider que ce n'est pas de sa faute mais celui de son entourage, de ses conseillers. Je n'en crois pas un mot : saint Marc nous a fait perdre la foi en lui à force de délires.
Jeannot Ramambazafy
Journaliste
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