Jour-J, ce mardi 27 novembre 2007, pour la campagne électorale pour élire le maire et les conseillers municipaux de la commune urbaine d’Antananarivo. Six candidats sont en lice. Mais seuls deux se dégagent du lot. Hery Rafalimanana, maire provisoire depuis neuf mois, grâce à la volonté du président Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina. Le premier est le candidat désigné du parti présidentiel et étatique TIM ; le second a créé l’association « Tanora malaGasy Vonona » ou TGV tiré de son surnom de « Train à grande vitesse »
A croire ce que j’ai entendu comme tout le monde sur la chaine nationale Tvm, cela ne fera pas un pli : Hery Rafalimanana va l’emporter. C’était au journal télévisé de 19h30 sur Tvm, ce 26 novembre 2007, à l’occasion de l’inauguration venue à point -4 mois seulement de travaux ayant coûté 560 millions d’Ariary, en partenariat avec la société pétrolière Jovenna- de la nouvelle gare routière d’Ampasampito, desservant l’axe Est de Madagascar. En effet, le président de la république a félicité en public ce candidat maire, pour avoir mené à bien ce projet qui lui tenait à cœur. Nous sommes tombés en plein style « VOICI » à l’envers. En effet, le président Ravalomanana a fait des pieds et des mains -et des sous- pour que la société propriétaire cède le terrain. Car c’est ici que Marc a rencontré Lalao qui deviendra son épouse ! Tant mieux pour lui s’il parle lui-même de sa vie privée, çà distraira momentanément les chaumières. Après 10 mn de délestage (coupure de courant) dans mon quartier, alors que la facture a été relevée de 15%, ce qu’a déclaré Manganirina Randrianarisoa, Chef de la région Analamanga, restera dans les archives de madagate.com
Le Chef de la Région Analamanga, Manganirina Randrianarisoa qui s'est fait menaçant
Après avoir loué l’action de M. Rafalimanana, il a carrément mis en garde sinon menacé les candidats qui oseraient franchir le seuil de la légalité, durant la campagne qui durera quinze jours. Mais qui se sent morveux se mouche, M. Manganirina. Ci-dessous, une photo extraite du journal « Ny Vaovaontsika », appartenant au Chef de l’Etat, en date du 26 novembre 2007.
Il s’agit d’un terrain de sport construit par la commune dans le quartier d’Isotry, très populeux et pataugeant dans la gadoue à chaque saison des pluies. Rien à redire si ce « Kianja » (stade) ne se nommait pas Rafalimanana Hery ! Eh oui. En matière d’humilité, ce candidat a énormément à apprendre. Michel Platini, lui, avait refusé que le stade de France, en région parisienne, porte son nom. Mais j’aimerai bien savoir ce que va dire Mister Manganirina étant donné que ce nom sera omniprésent même le jour du vote et au-delà . En prime, un tournoi sportif dénommé «Firaisankina » (solidarité) y sera organisé à partir du 1er décembre prochain. Cette situation me fait penser au méga portrait de l’Amiral Ratsiraka qui est resté accroché au mur d’un immeuble à Ampefiloha, le jour du 16 décembre 2001, au moment où les gens allaient voter.
Que va-t-il faire de plus ? Me trainer en justice ? Il n’y a qu’à Madagascar qu’on donne le nom d’une personnalité à une infrastructure, de son vivant. Avant cet énorme égocentrisme autorisé du poulain TIM, il y a bien eu le Professeur Zafy Albert qui, alors qu’il était président de la république a fait appeler une place à Ambibobe, province d’Antsiranana, « Place Zafy Albert ». Mais Hery Rafalimanana est-il réellement la personnalité qu’il entend être ? A-t-il l’étoffe d’un homme de pouvoir ou ne sera-t-il que l’homme de paille d’un système dictatorial qui commence à faire ses preuves ? En tout cas, même excentrique comme il est, le président Ravalomanana n’irait tout de même pas mettre une « Place Marc Ravalomanana » en son village natal d’Imerikasinina ! Même s’il a donné le ton de la démagogie, lors de son premier mandat, en déclarant que « tous les Malgaches auront une Renault 4L ! ». Pour l’heure, Hery Rafalimanana va commencer sa campagne, ce mardi matin 27 novembre 2007, en allant assister à une messe. Mais pas dans une église mais dans l’auditorium sis dans l’enceinte de Magro -filiale de Tiko- à Ankorondrano. Devinez qui y sera. Le style est donc donné : le TIM va tout faire pour remporter la victoire. La bataille (d’idées) sera rude car l’histoire des élections malgaches démontre que c’est toujours le parti au pouvoir, ayant donc l’appareil étatique entre ses mains, qui œuvre dans l’illégal et que les plaintes, après, sont déboutées en majorité par la juridiction compétente en la matière. Alors, si c’est le président-fondateur du TIM qui ferme les yeux, gageons que les membres de ce parti vont s’octroyer tous les abus possibles et imaginables si personne n’y met le holà avant que les dés ne soient jetés. Mon propos n’est pas, ici, de chercher à savoir qui va être élu ou non et pourquoi. Non, je veux qu’il y ait des archives qui serviront au tribunal de l’Histoire. Mais ne croyez pas que son challenger, Andry Tgv, va rester bras croisés. S’il s’est porté candidat, c’est qu’il a déjà les moyens financiers, une station audiovisuelle et surtout un projet de société basé sur les solutions suggérées par les bénéficiaires eux-mêmes, c’est-à -dire la majorité des habitants de la Capitale, sans distinction aucune. Les chances seraient légales si le TIM respectait les règles d’un jeu dont les dés sont déjà pipés. Je parle du code électoral.
Je vais vous dévoiler, ici, la dynamique qui pousse les Malgaches à voter -s’ils votent-, jusqu’à présent, pour le candidat de l’Etat. D’abord la peur, hérité du régime Arema capable de vous emprisonner pour un rien, et la désinformation agrémentée de dons en espèces ou en nature : « Si vous ne votez pas pour moi, les travaux qu’on a commencé ne seront jamais achevés » est l’exemple-type. Ensuite, cette indécrassable habitude de ne pas vouloir soi-même faire bouger les choses. « Avelao ihany izy eo fa mba nahavita zavatra e !» (laissons-le là car il a tout de même réalisé des choses). Mais quel est donc le candidat maire, sur terre, qui ne veut pas développer sa ville ? Or, ces petites gens qu’on sollicite hypocritement, une fois les élections accomplies, ne verront jamais leur quotidien s’améliorer de façon palpable. Ce sont ceux des bas-quartiers qu’aucun maire passé et présent ne s’est vraiment préoccupé. De simple colline boisée, Antananarivo est devenue une mégapole de près de deux millions d’habitants. L’urbanisme a été axé sur le centre et le tape-à -l’œil, sans considérer les « bords » où survivent la majorité des citadins. C’est l’image carte postale bonne pour les touristes et les nantis. Car ces belles avenues, ces beaux jardins sont inhabitables et inhabités la nuit. Rien que des bureaux, des hôtels ou des résidences haut de gamme en leurs alentours. Une partie infime de la population qui ne connaîtra jamais les affres des attentes vaines de bus, les mille dangers des ruelles mal éclairées, le manque d’eau potable en pleine capitale, le très faible pouvoir d’achat en contraste avec ces marchés flambant neufs…
Tous les quartiers encerclant l’Avenue de l’Indépendance -vraie centre ville- sont en train de devenir des ghettos dépourvus de toute hygiène. Sauf certains quartiers sont « chouchoutés » car plus visibles et plus TIM que d’autres. C’est bien beau de dire que les Malgaches sont sales. Mais qui se pose réellement la question de savoir POURQUOI ils sont sales ? Je vous inviterai bien dans mon quartier où, depuis sept ans que j’y habite, rien n’a changé. Les responsables du fokontany s’emmurent dans leur minable bureau comme des comploteurs attendant les ordres venant d’en haut. C’est ce système qu’il faut changer. Enfin, concernant toujours cette dynamique de vote, les Malgaches ne votent pas pour un programme mais pour une personne. En fait, la campagne électorale, à Madagascar, est synonyme d’approvisionnement en T-shirts et casquettes, en source d’argent facile et en spectacles musicaux -toujours- gratuits. Dans cette mécanique, vous verrez les gens d’un candidat, aller faire la queue pour avoir quelque chose chez l’autre candidat. Aussi, le nombre des personnes qui s’agglutinent pour écouter plus de la démagogie et du populisme qu’autre chose, ne peut pas être un indicateur de succès ou d’échec à Madagascar. Il faut se rappeler la foule venue lors des meetings de Roland Ratsiraka et de Norbert Lala Ratsirahonana, lors des présidentielles de décembre 2006.
Le candidat TIM portant (déjà ?) le flambeau de la victoire. On verra
Tout repose sur le nombre de ceux qui iront voter. En tenant compte aussi des possibilités de fraudes. Mais la majorité des Malgaches semblent hypnotisés par leur pauvreté qui n’est pourtant pas une fatalité, jusqu’à oublier qu’ils peuvent devenir maîtres de leur destin. En sont-ils conscients. Monsieur le Chef de la région Analamanga -que je connais bien pour avoir partagé avec la villa d’hébergement lors du sommet de la terre à Johannesburg- ignore-t-il que les fraudes ont émané, émanent et émaneront encore du parti au pouvoir, seul capable de manipuler les chiffres d’une façon ou d’une autre ? Croit-il qu’on ne peut pas trafiquer des logiciels informatiques ? Ou il est naïf ou il est inconscient et l’histoire le juge déjà car hier fait partie de cette histoire. Pour ma part, j’ai fait mon choix depuis longtemps sans attendre les menaces inutiles et à peine voilées de Manganirina Randrianarisoa. Voter c’est faire un choix et non pas déposer un bulletin dans une urne. Aussi, je vais supporter mon poulain à ma façon. Mais je ne force personne à voter Andry Tgv. Pour cette première semaine, ce qu’il devra faire est d’intimer les jeunes à accomplir leur devoir et user de leur droit de vote. Déjà pour changer l’âge de la classe politique future. Que ces jeunes, majoritaires à Antananarivo, soient vigilants et exigent leur carte électorale. Pas au dernier moment mais en allant vérifier les listes électorales et en dénonçant publiquement ceux qui attendent les ordres venant d’en haut. Que ces jeunes ne se laissent plus infantilisés par des « vous êtes les bâtisseurs du futur ». Le futur, c’est à partir d’aujourd’hui. Pas demain où il sera trop tard et les regrets ne viennent qu’après. J’avais aussi 18 ans en 1972 mais, à 53 ans, je constate que la vie de la majorité de mes compatriotes va de mal en pis. En passant, embellir la Cité des mille c’est bien mais c’est pour qui exactement sinon pour les gens de passage ? Retour à cette élection municipale : plus le nombre d’électeurs sera élevé, plus les chances d’être élu seront grandes pour Andry Tgv, malgré tous les abus que perpétreront ceux du parti au pouvoir. Car ce sont eux qui ont le plus à perdre. Surtout avec toutes les âneries qu’ils ont débitées. Croyez-moi, ils feront jusqu’à l’impensable. En cas d’échec, leur carrière sera brisée. Ils iront même jusqu’à utiliser les mêmes moyens que l’Arema a utilisé pour tenter de freiner Marc Ravalomanana. Le contexte n’est pas le même mais si une campagne électorale est une guerre d’idées, pour le TIM ce sera la guerre tout court, comme l’AREMA pour s’accrocher aux avantages du pouvoir. A ces moments-là , on promet la lune mais une fois les feux des lampions éteints, ce peuple qui vous a permis d’accéder au pouvoir ne compte plus guère dans la balance des décisions.
Amis visiteurs du monde entier, vous serez au courant de tous les abus qui ne manqueront pas de joncher cette campagne municipale 2007.
Il faut que vous sachiez que, dans la Grande île même, un peu plus de 10% de la population a accès à Internet. Mais ce taux est multiplié par 2,5 à Antananarivo grâce aux Cyber cafés. Ce mardi 27 novembre 2007, le premier rassemblement de tous les membres de l’association TGV a lieu, à partir de 11h, au stade d’Andranobevava, du côté du marais Masay. Déjà , la guerre des ondes est engagée entre les chaînes audiovisuelles MBS et VIVA. D’un côté, encenser Hery Rafalimanana qui a tout à perdre mais qui a l’appareil de l’Etat entre ses mains. De l’autre, démontrer qu’Andry Rajoelina compte, avant toute chose, sur la sincérité du vote. Attendons-nous à des arguments aussi ridicules qu’infantiles et infantilisant pour l’un, des déclarations logiques et pragmatiques pour l’autre. Concernant les médias publics, chaque candidat aura une intervention gratuite de… 36 secondes par jour, durant 15 jours, les spots publicitaires étant payants.
 Jeannot Ramambazafy