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Madagascar. Syndicalisme et politique, même combat sans l’être…

Grande photo: le syndicat des artistes avec plusieurs membres du CA de l'OMDA (Office malgache du droit d'auteur) et la mairesse, Lalao Ravalomanana. Sur les autres photos, ensemble: Sénateur Lylyson René de Rolland, Augustin Andriamananoro, Député Ranaivo Raholdina, Pierre Houlder (MAPAR); Lalao et Marc Ravalomanana (TIM); Lalatiana Rakotondrazaka (FREEDOM)

Le Travail est le garant du Développement réel et durable

La semaine dernière, le samedi 27 février 2016 pour être plus précis, le syndicat des artistes a fait d’une pierre deux coups. En effet, soudain consciente qu’une ville sans culture n’est pas une ville -et une Capitale d’un pays qui plus est!- la mairesse Lalao Ravalomanana a décidé de mettre à la disposition des artistes, un bureau au sein même de l’Hôtel de ville d’Antananarivo. Argument de Mme Ravalomanana: « La promotion de la culture et de l’art en général est un excellent moteur de développement, et on mettra tout en œuvre pour que la ville d’Antananarivo en tire également profit». Première pierre du matin.

Seconde pierre de l’après-midi de ce samedi, ce même syndicat des artistes a décidé de célébrer les 80 années d’existence du syndicalisme à Madagascar, au gymnase couvert de Mahamasina. Personne ne s’en est rendu compte, les esprits s’étant focalisés sur les personnalités présentes, mais le syndicalisme, dans la Grande île de l’océan Indien, a pris naissance en 1936, sous la colonisation française. C’est çà le scoop! En ce temps-là, la lutte se focalisait sur « des efforts apportés aux domaines de l’agriculture, de l’économie d’exportation et du développement des infrastructures. D’autre part, les syndicats représentaient l’unique possibilité de lutter pour les droits sociaux et politiques, puisque les partis politiques étaient défendus. Leur organisation s’orientait sur le modèle des syndicats français répondant à une obédience particulière, et se divisait ainsi en organisations chrétiennes, socialistes, communistes ou de « force ouvrière ». Après l’indépendance, les leaders politiques de la Première République ont été, en grande partie, issus de ces mouvements » (in: « Le mouvement syndical à Madagascar » du Dr Hanta Andrianasy et Shanti Groeger, FES, août 2011).

Ainsi, le mouvement syndical est indissociable de la politique à Madagascar. Le Député de Madagascar, Paul Bert Rahasimanana, alias notre Rossy national lui-même, se souvient que le premier syndicat qu’il a connu est celui de l’Akfm-Kdrsm créé Gisèle Rabesahala, scission du parti Akfm fondé par le pasteur Richard Andriamanjato. Du temps du président Philibert Tsiranana, ce parti était celui de l’opposition par excellence. Tous les trois, aujourd’hui, sont décédés …

A présent, passons sur la notion de politique. J’utilise, ici, les définitions d’un pays « normal »…

Un parti politique est une association organisée qui rassemble des citoyens unis par une philosophie ou une idéologie commune, dont elle recherche la réalisation, avec comme objectif la conquête et l’exercice du pouvoir afin de mettre en œuvre la politique (manière de gouverner) annoncée.

Si dans les régimes pluralistes (où existent plusieurs partis) la conception traditionnelle est que le pouvoir exécutif est en charge de l’intérêt national, indépendamment des partis, ceux-ci assurent bien la conduite de la politique nationale par l’intermédiaire de leurs représentants au gouvernement et dans la majorité parlementaire. Ils légitiment et stabilisent le régime démocratique, en le faisant fonctionner. Animateurs du débat politique, ils contribuent aussi à structurer l’opinion publique.

A partir de là, Madagascar entre dans « l’exception ». En effet, malgré les grands discours présidentiels, le pays n’est ni démocrate, ni pluraliste et la notion de majorité parlementaire se fait à coups de mallettes magiques. Si bien que l’instabilité politique est totale et le régime Hvm court à la poursuite du vent....

Deux faits corroborent. Primo: Bien qu’ayant pris naissance en 1936, le syndicalisme n’est qu’un mot vide de sens depuis l’avènement de Rajaonarimampianina en 2014. En effet, des syndicalistes, porteurs de doléances communes, ont été emprisonnés (ceux de la Jirama). Ceux d’Air Madagascar n’ont toujours pas été réintégrés dans leur fonction (le pilote Rado Rabarilala et ses confrères).

Secundo: il n’y a toujours aucun opposant officiellement déclaré qui siège au bureau permanent de l’Assemblée nationale, comme stipulé par la Constitution. En politique pure, il n’existe pas d’ennemi(s) à vie. Tout est question d’intérêts communs dans l’intérêt du plus grand nombre, of course. Actuellement, l’ennemi commun n’est autre que le président Hery Rajaonarimampianina et son parti créé de toutes pièces.

D’où la présence, au gymnase de Mahamasina, d’entités qui, dans un passé récent, s’étaient opposé. L’idéal serait qu’elles présentent un opposant officiel commun pour siéger à l’Assemblée nationale. Mais il faut avoir une culture politique assez élevée pour comprendre et mettre cela en pratique... Chacun entend parvenir au pouvoir, ce qui est normal selon la définition du parti politique, et pour l’heure, haro sur l’actuel président qui n’agit pas pour l’intérêt du peuple. En matière de trahison, c’est donc lui, actuellement, qui est le plus traître des traîtres, n’ayant fait que des promesses électorales sans lendemain. Ainsi, la présence de membres des partis TIM et FREEDOM et de l’entité MAPAR, côte à côte, est un signal fort pour le régime actuel qui n’a plus, avec lui et derrière lui, que le suffrage universel et les forces armées. La récente promotion de généraux et le renforcement de ses gardes du corps confirment cette affirmation.

Mais de quoi à peur le président Rajaonarimampianina sinon de lui-même? Il n’a jamais été un dictateur -au sens qu’il ne saura jamais imposer un programme qu’il n’a même pas-. Ses ennemis à lui sont des personnages -inaptocrates comme pas possible mais quasi intouchables pour l'heure- qu’il côtoie au quotidien mais il n’a pas le cran de s’en défaire. Ce qui fait qu’il est devenu leur otage et ne peut plus rien décider de son propre chef. S'il le fait, c'est pour débiter des âneries. Côté peuple, croyez-moi sur parole, ce président n’a plus aucune légitimité. Le TIM, FREEDOM et le MAPAR côté à côte, en fait, est -était- une dernière chance pour Hery Rajaonarimampianina de se ressaisir. Chacun aspire à prendre le pouvoir, mais d’une manière plus « normal » que ce que fait le parti Hvm en ce moment. Tous semblent avoir tiré des leçons du passé historique. Après, chacun ira de son côté. Mais ces entités, au moins, ont une vision claire de la reconstruction du pays. Ils ont chacun un programme réaliste et réalisable. Une fois Hery Rajaonarimampianina parti (quand? Comment? Tout, en fait, dépend uniquement de lui), chacun ira de son côté et espérons que le fair-play sera de mise pour de vrai. Car si on peut pardonner, on ne peut tout oublier. Ce sera donc un même combat sans l’être…

Mais d’un côté, comme nous sommes à Madagascar où tout -ou presque- s’achète, sauf la mort, Hery Rajaonarimampianina risque de perdurer tant qu’il [y] aura de l’argent -qui ne lui appartient pas- à distribuer. Et la nation, qui ne meurt jamais, perdra encore un temps fou pour reconstruire tout ce qu’il a très bien réussi à détruire en deux ans: la notion même du « Fihavanana » et du patriotisme, le tissu économique, le respect de la parole donnée, le sens de l’honneur et de la souveraineté nationale. Oui, Mesdames et Messieurs, il a détruit tout çà en 24 mois! Un record dans son genre. Et cela risque de continuer avec les élections à venir qui seront l’affaire des « grands électeurs » tous en cravate bleue Hvm.

Mais mon petit doigt m’a dit que Dieu ne lui permettra plus de continuer encore trop longtemps dans cette voie. Alors? Il va trébucher de lui-même. Comme le dit si bien un proverbe malgache: « Ho tafita vao ho rendrika ». Au moment où il se croira tiré d’affaire, le ciel lui tombera sur la tête par Toutatis! Je ne suis pas devenu subitement fataliste mais je suis Malgache et c’est ce qui lui arrivera. Et plus tôt qu’on le croit…

Je divague ou je dis vague? Qui survivra verra, mais croyez bien que je ne suis pas Jeannostradamus… Mais l’Histoire me donnera toujours raison.

Les schémas déjà vus et possibles à l’avenir, concernant les présidents malgaches élus

Philibert Tsiranana. Un président élu à plus de 98% en janvier 1972 et qui a chuté sans espoir de retour en mai 1972. Il est décédé en 1978. Il y a eu une tuerie d’étudiants le 13 mai 1972. Mots insensés: « Tsak-tsak zato arivo »*.

Richard Ratsimandrava. Assassiné le 11 février 1975. A signaler, même s’il n’a été que chef d’Etat et chef de gouvernement transitoire. Exception confirmant toute règle.

Didier Ratsiraka. Deux fois parti en exil en France. En 1993 de son plein gré, après sa défaite contre le Pr Zafy; en 2002, en s’enfuyant à bord d’un avion du gouvernement français à partir de Toamasina. Il y a eu une tuerie le 10 août 1991 aux alentours du palais d’Iavoloha. Mots insensés en 1991, contre le mur de Jéricho («Mandan'i Jeriko») des Forces Vives du général Jean Rakotoarison dit « Voaibe » et du Pr Zafy: « Na hiodina in-7, in-77, in-777, tsy hiala aho !»*.

Zafy Albert. Frappé d’une motion d’empêchement par les députés de l’Assemblée nationale

Marc Ravalomanana. S’est enfui en Afrique australe après avoir dissous son gouvernement, démissionné et remis ses pouvoirs à un « directoire militaire » inexistant dans la constitution. Il y a eu une tuerie le 7 février 2009 devant le palais d’Ambohitsorohitra. Mots insensés: « Tsapaho aloha ny herinareo vao mitsapa ny aty »*.

Hery Rajaonarimampianina. Soit il deviendra subitement fou à lier (le poids du remord est lourd à porter); soit il démissionnera (impossible avec un entourage d’arrivistes profiteurs); soit il se suicidera (ou sera suicidé par son entourage dans le style « raha maty aho matesa rahavako » -si je meurs mourrez avec moi-); soit il s’enfuira subitement (Afrique du Sud ou ile Maurice) sans demander son reste pour pouvoir profiter de l’argent qu’il a amassé. Ses enfants sont déjà à l’extérieur. Mots insensés: « Olona efa mba nitondra ihany; olona efa mba tao anatin’ny fitondram-panjakana ihany, fa inona no nataon’ireny? Tsy misy nataon’ireny! Mivezivezy fotsiny! Mitondra vola kely, mitondra eau Vive »*. Sinon? Les voies du Seigneur sont insondables… Pour le moment, survivons et nous verrons.

* Faites-vous traduire, ô cartésiens amoureux de mon pays.

Jeannot Ramambazafy – 1er mars 2016

 

Mis à jour ( Vendredi, 04 Mars 2016 06:55 )  
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