C’est ce 12 février que Messieurs Alain Joyandet et Andry Rajoelina se sont rencontrés au domicile de ce dernier. Ce qui est ressorti ? La nébuleuse du langage diplomatique…
« Nous pouvons toujours trouver une solution face à la crise que Madagascar traverse aujourd’hui. Comme on dit, un consensus démocratique est toujours pacifique. Et je tiens à rappeler que c’est la population qui a revendiqué pas mal de choses, sans arme. Notre seule arme c’est la voix du peuple.
Que retirez-vous de cette réunion ?
Ecoutez, ce que je peux retirer de cette réunion, c’est d’avoir expliqué clairement la situation à Madagascar, par rapport à la communauté internationale et aussi à la Commission de l’océan Indien (COI).
Question : Vous êtes toujours ouvert à la négociation ?
Nous sommes toujours prêts à dialoguer et surtout à trouver une issue face à la crise actuelle à Madagascar.
Ce que je retiens, ce que nous retenons tous ensemble, c’est que cette visite a été utile. Après avoir vu le président, après avoir vu M. le maire, on a le sentiment que l’un et l’autre -j’espère que les faits ne nous démentirons pas- vont faire en sorte que le dénouement de cette crise se fasse dans les conditions qui évitent à nouveau tout grave évènement comme celui qui a eu lieu la semaine dernière, samedi. Le message que nous avons passé c’est : plus de morts, plus de violence et je crois que ce message a vraiment été bien reçu.
Nous sommes dans une autre catégorie de problème, c’est la question de la négociation. Ce n’est pas nous qui conduisons cette négociation. Elle a lieu en ce moment, elle est d’ailleurs conduite par les représentants des églises qui sont très importants ici, et on veut, évidemment rien faire qui puisse gêner ces négociations. On a le sentiment, nous avons entendu, en tout cas, de la bonne volonté des deux côtés et, à l’instant, nous avons entendu le souci -nous avons beaucoup apprécier cela-d’améliorer le sort, sur le plan social et économique, de la population malgache. Et c’est très important aussi pour que cette crise prenne fin.
Ce 12 février 2009 encore, avant de quitter la Grande île, M. Haïle Menkerios, envoyé spécial de l’ONU est allé au domicile de M. Rajoelina pour lui dire au revoir. A sa sortie, il a été cueilli par les journalistes. Extraits de ses déclarations : « (…) Ce dialogue est facilité par les Malagasy et les groupes et leaders des chrétiens qui sont des facilitateurs. Nous sommes très heureux de çà . Ils ont commencé. Je suis encouragé. Il n’y a pas de conditions. Les deux parties sont arrivées avec leurs propositions. Les seuls conseils que nous leur avons donné est qu’il faut inclure les autres forces politiques, la société civile. Et ils sont d’accord. Je suis encouragé (…) ».
En tout cas, et nous parlons par expérience, la situation risque de s’envenimer une fois tous les émissaires partis. Car, face à un dictateur, le schéma est immuable. En 1991, alors correspondant de Madagascar Tribune à Diego Suarez, actuellement Antsiranana, le Premier ministre de l’époque, Guy Willy Razanamasy, était venu pour libérer les otages pris par les fédéralistes. Il croyait fermement que tout allait s’arrêter. Ayant vécu assez longtemps dans cette ville septentrionale de Madagascar, j’ai hurlé pour dire qu’au contraire cela ne faisait que commencer. J’avais même demandé de partir avec sa délégation, prêt à tout quitter, mais il n’y avait plus de place dans l’avion spécial qui les avait amenés. Une fois celui-ci dans les airs, les fédéralistes sont sortis de leur tanière, dressant leur drapeau sur tous les bâtiments publics et terrorisant le public, masqués par des cagoules. Quelques jours plus tard, je fus, moi-même, pris en otage par la bande à Fredo Betsimifira et Coutiti, dans les locaux de la province (« Faritany »). J’ai du mon salut grâce à Reporters Sans Frontières qui a répercuté partout, mon arrestation. J’ai été libéré par Thérèse Bandrou qui a été tuée lors d’un affrontement entre forces régulières et fédéralistes dirigés alors par les capitaines Coutiti, Rahitso et Zeze. A ce moment-là , j’étais en route sur Antananarivo caché dans un camion.
"Madagascar Tribune" N° 4000 du Vendredi 08 Mars 2002
CRISE POLITIQUE, NON À LA VIOLENCE !
(…)Signalons, d'autre part, que notre correspondant permanent à Diégo Suarez, Narcisse Randriamirado a été avant-hier soit menacé directement,
soit sur les ondes d'une radio privée pro-Arema, par le ministre Fredo Betsimifira. Ce dernier veut certainement rééditer ses « exploits » de
1991, en s'acharnant sur les Merina résidant à Antsiranana, et qui ont conduit à la fuite dans la forêt de Narcisse et de sa famille, ainsi
qu'à l'enlèvement, en plein jour, de notre collaborateur Jeannot Ramambazafy.
Franck Raharison
Quoi que puissent écrire et/ou dire les pseudo-analystes de tous les horizons, l’heure est grave pour Madagascar. Il est vraiment insupportable que tout le monde voit en cette grande île de l’océan Indien, un terrain de sport sur lequel s’affrontent deux champions. On parle de « supporters », des gens qui n’habitent même pas ici s’amusent à lancer des informations aussi fantaisistes les unes que les autres, à tête reposée devant leur ordinateur. Mais attention, le « çà n’arrive qu’aux voisins » n’existe plus, depuis les attentats du 11 septembre aux USA. Au final ? Marc Ravalomanana s’en ira, comme Philibert Tsiranana et Didier Ratsiraka avant lui, qui avaient épuisé leurs ressources avant de quitter la scène. Mais Marc Ravalomanana s’en ira, lui, après combien de morts à son compteur personnel, avec la constitution comme permis de tuer ? Tous ceux qui continuent à tergiverser auront les futurs morts sur la conscience. Il n’est plus question de légalité ou de constitutionnalité, il est question d’un futur massacre qui se prépare. Cette nébuleuse du langage diplomatique est l’antichambre d’une mort collective programmée. Il ne s’agit plus de la population d’Antananarivo qui est en danger de guerre civile mais Madagascar dans toute son entité. Puissions-nous survivre pour relater cela.