Le 19 janvier 2021 marquera les deux années (sur cinq) de pouvoir du Président Andry Rajoelina. C’est déjà comme si ce sera demain. Et, malgré pratiquement une année de perdue à cause de la pandémie mondiale du coronavirus -à partir de mars 2020 à aujourd’hui 9 décembre où le coronavirus sévit encore-, des avancées palpables ont été effectuées dans certains domaines stratégiques si, dans d’autres secteurs vitaux, l’immobilisme voire la régression a été, est flagrante.
Quel est l’état d’esprit actuel du Président Rajoelina et quel est celui qui anime les élus et les nommés de Madagascar ? Le pays a-t-il vraiment avancé, en prenant les choses de manière globale ? Le problème actuel, surtout après l’avertissement clair lancé par le chef de l’État, lors du conseil des ministres dernier, aux membres du gouvernement, c’est que beaucoup vont faire semblant de travailler, faire même du zèle pour bien se faire voir. Pas par amour de la patrie mais par peur de perdre leur poste, et surtout les avantages qui y sont liés. Du déjà -vu, déjà -vécu. Mais est-ce que les membres du gouvernement sont les seuls responsables de la réussite ou de l’échec ?
Au-dessus du lot, loin dans ses bureaux des Palais d’Ambohitsorohitra ou d’Iavoloha ou dans ses fréquents déplacements, le Président Andry Rajoelina ne peut pas avoir le don d’ubiquité ni tout savoir de certaines décisions prises par celles et ceux (les élus) à qui le peuple et lui (les nommés) ont donné confiance. Le résultat, en cette fin d’année 2020, est qu’on a la mauvaise impression que ce sont les nommés qui dirigent le pays à leur façon. Et les réactions, toujours tardives, en deviennent risibles voire ridicules : celles de pompiers qui tentent d’éteindre un feu qu’ils ont eux-mêmes allumé. Ils ignorent le mot anticipation et le fait que gouverner c’est prévoir et non pas attendre tout le temps des directives de la part du Président de la république. Mais il existe bel et bien un programme et une politique générale de l’État à suivre, que diable !
Du coup, peu d’entre eux utilisent le dialogue social sinon le dialogue tout court, faisant la sourde oreille à propos de sujets parfaitement maîtrisables pourtant, mais qui finiront par exploser un de ces quatre matins à cause de ce comportement inexplicable et inexpliqué mais dangereux pour la nation même… Une chose est sûre : Le Président Andry Rajoelina ne s’est pas pointé par hasard et il sait ce qu’il veut pour le bien des Malagasy qui forme la Nation. Il le sait depuis 2009 et même avant. Voici d’ailleurs, des extraits de son discours du 21 mars 2009, prononcé en français, au stade municipal de Mahamasina.
« (…) Le peuple malgache a encore une fois marqué sa volonté de changement, cette volonté est inébranlable, indestructible. Je suis ici, devant vous aujourd’hui, conscient de l’ampleur de la tâche qui nous attend, reconnaissant pour la confiance que vous m’avez témoignée et conscient des sacrifices que vous avez consentis, pour que nous puissions ensemble atteindre nos objectifs. Nous sommes réunis aujourd’hui, car nous avons vaincu la peur, nous avons l’espoir et la volonté de travailler main dans la main pour donner une nouvelle chance à notre pays de marcher enfin vers un véritable développement. Nous proclamons aujourd’hui la fin de la dictature, de la gabegie dans la gestion des affaires d’État, des mensonges et des fausses promesses, des exclusions et de la pensée unique qui ont, pendant, longtemps étouffé notre vie politique. Nous avons parcouru ensemble un long chemin, qui n’a jamais été un parcours pour les craintifs, mais pour les hommes et les femmes déterminés à réaffirmer la grandeur de notre Nation, parce que nous sommes convaincus que cette grandeur n’est jamais donnée, elle se mérite. (…) Nous avons franchi une étape importante, mais le plus dur reste à faire, à partir d’aujourd’hui, nous devons nous relever, et reprendre la tâche de la refondation de Madagascar.
(…) Je sais qu’il y a des gens qui s’interrogent sur l’ampleur de nos ambitions, et qui pensent que nous serons capables de faire face à trop de grands projets à la fois. Mais je me permets de leur rafraîchir la mémoire. Il ne faut pas oublier ce que des hommes et des femmes malgaches, assoiffés de liberté, ont déjà fait ; et ce que des hommes et des femmes désormais libres peut réaliser quand l’imagination sert un objectif commun et que le courage s’allie à la nécessité. Nous gèrerons les deniers publics avec sagesse, en pleine lumière et en toute transparence ; nous changerons les mauvaises habitudes. C’est seulement ainsi que nous pourrons restaurer l’indispensable confiance entre un peuple et son gouvernement.
(…) Par ailleurs, je veux rassembler tous les Malgaches ; je veux que chacun comprenne qu’il a sa place dans un pays libre, juste et bien gouverné. Il nous faut changer, non pas par amour du changement, mais parce que les Malgaches attendent autre chose que des discours du passé, des solutions et des mots vides de sens. Travaillons ensemble sans arrière-pensée, ensemble, la réussite est à notre portée. Pour ce faire, nous sommes décidés à privilégier le dialogue et la concertation avec les acteurs politiques et de la société civile, les opérateurs économiques et toutes les composantes de la Nation.
(…) Je connais les difficultés des défis qui m’attendent. Notre force a été et sera d’être ensemble et de le rester. Les défis face à nous sont peut-être nouveaux. Les outils avec lesquels nous les affrontons sont peut-être nouveaux. Mais les valeurs dont notre succès dépend, le travail, l’honnêteté, le courage, le respect des règles, la tolérance, la loyauté et le patriotisme, sont connues de tous. Nous devons, de nouveau, faire nôtres ces valeurs. (…) Nous devons entamer une nouvelle ère de responsabilité, une reconnaissance, de la part de chaque Malgache, que nous avons des devoirs envers notre pays, des devoirs que nous n’acceptons pas à contrecœur mais saisissons avec joie, avec la certitude qu’il n’y a rien de plus satisfaisant pour l’esprit et qui définisse notre caractère, que de nous donner tout entier à une tâche difficile. C’est le prix, la promesse et le défi de la citoyenneté.
(…) Oui, nous allons changer ; oui, nous avons changé, tourné la page pour une nouvelle histoire de notre pays. Nous avons besoin des uns et des autres, le concours de tout un chacun, hommes et femmes, et surtout les jeunes, est indispensable. Ensemble nous allons reconstruire, bâtir et nous unir. Nous allons trouver une nouvelle approche, fondée sur l’intérêt et le respect mutuel (…)./.
C’était au début d’une période de transition dans laquelle il n’avait vraiment pas les coudées franches. Un « fiaraha-mitantana » (un « gouverner ensemble » avec tous les partis et particules politiques existant à l’époque) dont certains se souviennent soudainement actuellement, et veulent faire renaître. Il aura fallu attendre une décennie (mars 2009 – janvier 2019) pour qu’Andry Rajoelina devienne un président de la république élu au suffrage universel et reconnu publiquement comme tel par Marc Ravalomanana, l’homme déchu car ayant déçu un peuple à qui il a menti dès l’entame de son second mandat, en leur faisant prendre des vessies pour des lanternes.
Cependant, un aspect dramatique de l’ambiance actuelle réside dans le fait que la cohorte des militants indéfectibles lors de la lutte de 2009 ayant causé mort d’homme, a été écartée pour faire place à des opportunistes et des « retourne-veste » qui commencent à montrer leurs dents longues… Par ailleurs, et c’est l’autre aspect tout aussi dramatique, être hyper diplômé(e) n’a jamais été et ne sera jamais une garantie de succès dans le domaine de la gestion d’un État tout entier. Et pour masquer l’incapacité à trouver des solutions, le cloisonnement, le repli sur soi deviennent une règle. Jeu dangereux qui complique tout et impactant directement sur le Président de la République, à son corps défendant.
Andry Rajoelina, jeune entrepreneur qui a réussi puis Chef d’État élu démocratiquement, n’a plus rien à démontrer en matière de leadership. Il est bien l’homme qu’il faut à la place qu’il faut pour développer Madagascar. Cependant, ici (dans la conduite d’une nation s’entend) il faut bien faire la part des choses : la direction est beaucoup plus importante que la vitesse car trop de personnes autour de lui se dirigent rapidement vers nulle part, à l’écart des objectifs réels. Et ce sont les critères des bases qui l’amènent à choisir l’ossature de son équipe, qui demeurent un épais mystère. La transizione è finita ! Certes, il ne s’agit pas de procéder à des changements toutes les 20 minutes, mais il s’agit de trouver un système efficace pour débusquer les feignants (participe présent du verbe feindre, qui désigne à l'origine quelqu'un qui fait semblant de mettre du cœur à l'ouvrage). Et les éloigner sans état d’âme, mais non pas les reconvertir. Ils feront pire à coups de coupures et autres délestages sans crier gare…
Par ailleurs, le patriotisme est un sentiment partagé d'appartenance à un même pays, la patrie, sentiment qui en renforce l'unité sur la base de valeurs communes. Il conduit à ressentir de l'amour et de la fierté pour sa patrie. Le patriote est prêt à se dévouer ou à se battre pour elle afin d'en défendre les intérêts. Mais pour l’instant, à Madagascar, certains se battent pour les beaux yeux du Filoha, pour être bien vu(e) par lui. Comme du temps des partis PSD et AREMA. Avec des propos sans retenue, totalement ahurissants parfois. Ce culte de la personnalité stérile, écorne l’atout confiance du Chef de L’État. Car n’importe qui peut atterrir en prison au nom du « fanongam-panjakana ». Je ne parle pas, ici, de la désinformation et des fake news. Et qui utilisent ce stratagème usé jusqu’à la corde ? Des proches du pouvoir actuel -ou qui prétendent l’être- encore et toujours, sous prétexte de le « défendre ». Beaucoup semblent oublier que Madagascar c’est 587.041 km² et plus de 26 millions d’habitants et non pas Antananarivo uniquement. Le nom Andry Rajoelina devient le sésame de toutes les magouilles corruptives possibles, certaines inimaginables. A croire qu’il a été élu pour çà ma parole ! Ainsi donc si Andry Rajoelina a la volonté de changer les choses, certains autres non. Et c’est dans cette faille que se précipitent les opposants qui s’opposent à tout en œuvrant, eux, dans la « misinformation » (fausses rumeurs, canulars, insultes et fumisteries) condamnée par l’ONU.
En matière de communication, justement, si l’on prend le temps de parcourir les réseaux sociaux, Facebook plus particulièrement, on se rend compte que chacun tire la couverture à soi pour bien se faire voir. Et, à force de trop défendre le président, cela en devient suspicieux. Ces feignants applaudisseurs patentés ignorent certainement le proverbe chinois qui dit : « On mesure une tour à son ombre et les grands hommes au nombre de leurs détracteurs ». Cela veut dire que la grandeur d’un homme peut se voir à travers les ennemis qu’il a. Mais cela ne veut pas dire du tout qu’il faut minimiser la capacité de nuisance -même sans faire exprès, par incompétence-, des ennemis qui se trouvent à l’intérieur. Les autres, avançant à visage découvert, ne sont dangereux que pour eux-mêmes.
En résumé, dans la vie (politique) on a toujours le choix. Mais il suffit de faire le bon pour ne pas se mordre les doigts pour longtemps et vivre de remords. Moi, si j’étais président ? Après le prochain remaniement inévitable, je donnerais trois mois, un trimestre, aux membres du gouvernement pour mettre à jour une action spectaculaire pour le bien du grand nombre. Du genre, par exemple, de la mise en place effective d’au moins une des trois centrales solaires prévues pour renforcer l’alimentation en électricité de la capitale et celle du Réseau Interconnecté d’Antananarivo (RIA), qui ont fait l’objet, le 4 novembre 2020, d’une signature de convention entre la Jirama et la société allemande Oursun Green Power. Pour que cela ne devienne pas un second Symbion Power à la HVM…
Autre souhait : le redémarrage effectif de la société d’état Kraoma qui a trop longtemps souffert de vagues corruptives s’étalant sur un lustre, encore sous le mandat du Président Hery Martial Rajaonarimampianina Rakotoarimanana, l’homme des divisions sans vision, jusqu’à nos jours. Et, jamais deux sans trois : l’installation effective et pérenne de pipelines pour drainer et irriguer l’eau des fleuves et rivières entourant la région Androy. Et, pourquoi pas, la transformation de l’eau de mer de Taolagnaro en eau douce, avec du matériel à énergie solaire ? Car, encore une fois, ce n’est pas l’eau qui manque dans le Sud, c’est sa gestion qui n’est pas maîtrisée. La solution au Kere, c’est cela et non pas les distributions de vivres amenant la fainéantise et l’éternelle politique de la main tendue.
En tout cas, ce n’est pas le genre du Président Andry Rajoelina qui, cependant, ne peut pas tout faire tout seul. Il lui importe alors de démontrer cette volonté de changer les choses en changeant les maillons faibles par des éléments de terrain qui savent ce que le « maha-olona » signifie et non axer les actions sur le « rendement » seulement. C’est quoi le « maha-olona » ? Informez-vous ! Mais connaissez-vous l’empathie, l’altruisme et le don de soi ?
Jeannot Ramambazafy